Rubato Mélomane chevronné

Nombre de messages : 12827 Date d'inscription : 21/01/2007
 | Sujet: Re: Le meilleur de la viole de gambe Lun 16 Jan 2023 - 16:17 | |
| - xoph a écrit:
- Solo
Jean-Sébastien Bach (1685-1750) Carl Friedrich Abel (1723-1787)
Lucile Boulanger, viole de gambe
L’on dit que les sonates pour viole de gambe de Jean-Sébastien Bach auraient été écrites pour Christian Ferdinand Abel, virtuose de la viole et père de Carl Friedrich Abel ; ce quasi-dernier* des compositeurs pour viole de gambe aurait eu son propre père pour professeur, et Jean-Sébastien Bach.
La boucle est bouclée ? Pas si vite, Lucile Boulanger construit son disque sur des interrogations : « le fossé entre la musique qu’Abel donnait en public, bien écrite mais un peu « facile », et le niveau de profondeur qu’il atteignait en privé dès qu’il improvisait à la viole [dont le manuscrit Drexel, dans ses biffures, et reprises porterait la trace] », ou « Pourquoi Bach n’a-t-il pas écrit pour la viole seule ? ». Lucile Boulanger monte avec rigueur ses propres suites pour viole de JSB (s’appuyant pour ses transcriptions sur celles de JSB lui-même entre instruments seuls, ou des solos pour instruments seuls dont la tessiture est comparable à la viole) ; agence les pièces d’Abel (dans la liberté qu’offre le manuscrit Drexel) ; mêle exceptionnellement une gigue d’Abel à sa propre construction d’une suite de JSB. Envolées les transcriptions pour viole d’œuvres dédiées à d’autres instruments (suites pour violoncelle par exemple, comme pour le récent disque de Myriam Rignol, mouais… ou celui de Pandolfo, superbe), mais construction-invention d’une image de la viole chez JSB, et sa mise en regard du caractère improvisé et intime des pièces d’Abel. Sur deux CD "La Chair" et "L'Esprit", dont les intitulés me laissent par contre interrogatif.
Au delà de ce montage audacieux et imaginatif, le plus précieux est ce qu’elle nous donne à entendre. Rien d’une viole éthérée, un son charnu et dru, des attaques franches, des dynamiques parfois presque de « violoncelliste » (qui font penser à Pandolfo, dont elle n’a pourtant pas été l’élève), une fluidité dans les ornementations (que le vent nous emporte) superbe, une tension toujours présente (qui tend les arpèges des deux ouvertures des deux CD : WTK BWV 846 et Abel WKO 205). Et le pari si réussi, au-delà des échos entre Abel et Bach, de nous faire entendre ces fausses suites comme si nous les avions presque toujours connues.
Lucile Boulanger joue une basse de viole François Bodart 2006 d’après Joachim Tielke (Hambourg, 1699) ; la prise de son et direction artistique est d’Aline Blondiau. A excellence, excellence et demi !
*bien que Lucile Boulanger semble décidée à changer la donne, en invitant des compositeurs ou compositrices contemporain·e·s à composer pour son instrument.
 J'ai bien fait de vérifier avant de faire un commentaire! Rien à rajouter au commentaire fouillé de xoph, sinon que j'aime beaucoup! |
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Bruno Luong Mélomaniaque
Nombre de messages : 1519 Date d'inscription : 07/08/2012
 | Sujet: Re: Le meilleur de la viole de gambe Lun 16 Jan 2023 - 16:37 | |
|  J'aime aussi ce disque de Lucike Boulanger. |
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