Les Jardins de William Christie : 25/08/2016
Fond du Miroir d'eau Jardins du domaine de William Christie
Église de Thiré
15h45 – 19h : Promenades musicales :La première partie de la journée se déroule dans les jardins de Christie, dans ces jardins qu'il a si bien construit et créé pour donner différents kiosques et ambiances qui sont si représentatifs des jardins à la française. Il faut bien pense qu'à l'origine, il n'y avait qu'un seul bâtiment certes ancien et beau, mais sans tout ce superbe environnement ! Au fil des ans, il a non seulement rendu au bâtiment toute sa beauté, mais aussi apporté toute sa grandeur au jardin.
Il est maintenant ouvert au public durant ce festival et nous aurons donc le plaisir pour la deuxième année consécutive (même si cela fait 5 ans maintenant que le festival existe) de passer une journée hors du temps et plonger dans la musique pour des heures !
Pour cet après-midi, ce sera donc un atelier suivi de cinq petits concerts...
15h45 – 16h30, Atelier : Molière, mariage des muses Animation : Sophie Daneman
Soprano : Claire Debono
Haute-contre : Erwin Aros
Basses : Matthieu Lécroart, Cyril Costanzo
Clavecin : Benoît Hartoin
Pour cet atelier en famille, Sophie Daneman nous emmène petits et grands vers la comédie ballet, nous expliquant un petit peu ce qui composait ce style particulier... en agrémentant la présentation par des extraits musicaux.
La force de cet atelier, c'est sa bonne humeur et sa simplicité. Durant les trois quarts d'heure, Daneman sait non seulement se mettre à la portée des enfants, mais aussi apprendre des choses aux adultes. Et les chanteurs donnent énormément de leurs personnes, en s'amusant comme des fous et en aidant le public à chanter. Car en effet... si les chanteurs nous font découvrir de nombreux extraits avec simplicité et bonne humeur (des petites mises en scènes simples mais bien faites), le public doit aussi chanter et participer. Il y a donc dans un premier temps un échauffement qui met tout le monde de bonne humeur... et puis ensuite c'est le chœur en l'honneur de Louis XIV du prologue du
Malade imaginaire...
Soulignons les belles prestations non seulement de Benoît Hartoin au clavecin qui sait donner vie à l'orchestre par son seul instrument... mais aussi des chanteurs. Cyril Costanzo se montre impressionnant de charisme et de voix : la basse et tranchante et claire, mais avec un superbe grave et un aigu percutant. Matthieu Lécroart est bien connu et sait trouver tout l'humour nécessaire malgré une voix moins sonore que le jeune Costanzo. Erwin Aros avait été le point noir de
Tancrède de Campra à Avignon... il se montre ici pourtant beaucoup mieux chantant avec une sérénade superbe et une vieille mythique ! Enfin Claire Debono connait ce répertoire comme sa poche et nous fait bénéficier de toute son expérience avec une voix claire et sonore.
Un superbe moment...
La Pinéde 16h45 – 17h, Concert : Enée et DidonCampra : Enée et Didon, sixième cantate à deux voix
Soprano : Claire Debono
Basse : Cyril Costanzo
Viole de gambe : Myriam Rignol
Clavecin : Florian Carré
Alors qu'il devait avoir lieu dans le superbe Jardin Rouge, ce petit concert est déplacé dans la pinède vu les conditions climatiques...
On retrouve ici une magnifique cantate de Campra où les deux chanteurs alternes chants d'amour ou de réjouissance. Claire Debono se montre impeccable de diction comme de style, toujours à faire sonner le texte et lui donner sa force d'évocation tout en sachant broder dans un style parfait ! Cyril Costanzo se montre par contre légèrement en difficultés à certains moments. En effet il lui manque un petit peu d'aisance par moments et l'aigu semble se dérober en d'infimes instants. Malgré tout la prestation reste de belle facture mais on ne trouve pas encore la facilité de Debono pour ce répertoire.
Pour l'accompagnement, Myriam Rignol et Florian Carré se montrent dignes de la partition en sachant créer un accompagnement significatif et varié.
La partition reste de toute manière géniale, du grand Campra !
Le Cloître 17h15 – 17h30, Concert : Tell me no moreJohn Blow : Tell me no more
John Dowland : Shall I strive with words to move – Now, oh now I needs must part – Wep you no more sad Fountains
Ténor : Nicholas Scott
Luth : Thibault Roussel
Le Cloître n'était pas ouvert lors de l'édition précédente et pourtant c'est un lieu magnifique pour ce genre de concerts.
Malheureusement le rendu du concert est un peu décevant. En effet, Nicholas Scott connait bien le style mais la voix manque de fluidité et de nuances à certains moments. Le timbre n'est pas non plus des plus beaux. De plus, Thibaut Roussel manque un peu de folie dans son accompagnement. Le jeu est beau mais on est loin de myriades de nuances que peut donner un Dunford par exemple.
Le résultat est donc qu'on a bien entendu quelques mélodies accompagnées au luth... mais sans que nous n'ayons vraiment été emporté par la beauté des compositions.
Le Théâtre de Verdure 17h45 – 18h, Concert : Un Concerto perduGeorg Philipp Telemann/Johann David Heinichen : Concerto à 6 pour flûte et violon, TWV 52:e3-2
Flûte : Joseph Monticello
Violon solo : Augusta McKay Lodge
Violon : Michèle Sauvé, Nayeon Kim
Alto : Toma Iliev
Violoncelle : Alexander Nicholls
Contrebasse : Douglas Balliett
Basson : Benjamin Matus
Théorbe : Thibault Roussel
Pour ce concert, ce sont les élèves de la Juilliard School qui nous offrent du Telemann... accompagnés par la chevronnée Michèle Sauvé et de Thibault Roussel des Arts Florissants. Le résultat est assez intéressant face au Mur des Cyclopes... Il manque peut-être juste un peu plus de brillant dans les deux solistes. Mais les musiciens sont très impliqués et on a un ensemble parfait de tous ces jeunes musiciens promis au plus bel avenir !
La Cour d'Honneur 18h15 – 18h30, Concert : Les goûts mélangés d'AllemagneGeorg Philipp Telemann : Quatuor parisien N°6 en mi mineur
Flûte : Joseph Monticello
Violon : Augusta McKay Lodge
Violoncelle : Alexander Nicholls
Clavecin : William Christie
De nouveau Telemann... mais à savoir si c'est grâce à la présence du maître ou juste de la partition, toujours est-il que le résultat est particulièrement brillant et impressionnant !
Les petits jeunes se sont d'abord installés... puis le chef est arrivé calmement, doucement, assuré d'être chez lui tel Louis XIV parcourant son jardin...
Ensuite, il ne va faire qu'accompagner, jamais diriger. Il laisse ces trois jeunes instrumentistes s'accorder et se répondre alors qu'il donne sa partie avec la facilité qu'on lui connaît sur son instrument.
Le concerto est de plus magnifique... un grand moment de musique et qu'il est impressionnant de voir ces trois jeunes jouer à jeu égale avec le grand Christie !
Les Terrasses 18h45 – 19h, Concert : Extraits de Monsieur de PourceaugnacNous retrouvons ici tous les musiciens des Arts Florissants (William Christie en tête!) et les quatre chanteurs qui ont participé à l'atelier du début d'après-midi.
Le principe de ces concerts sur la Terrasse est de rassembler tous les visiteurs (qui avant étaient dispersés sur les différents concerts simultanés) pour des extraits d'une dimension plus importante. Ici des extraits du futur concert sur le Miroir d'Eau.
Tous les chanteurs se montrent très impliqués et pleins d'humours... mais là où Aros s'était montré bien chantant dans l'atelier, il renoue ici avec des intonations étranges et un manque de finesse. Les deux basse Costanzo et Lécroart par contre sont toujours aussi parfaits d'humour et de charisme.
Une bien belle façon pour terminer un après-midi de musique varié et si agréable dans un tel cadre !
L'église de Thiré 20h30 – 21h45 : Concert aux chandellesPierre Bouteiller : Missa pro Defunctis
Sébastien de Brossard : Stabat Mater
BIS : Sébastien de Brossard : Ave Verum
Sopranos : Élodie Fonnard, Maud Gnidzaz, Juliette Perret
Contre-ténor : Bruno Le Levreur
Haute-contre : Nicholas Scott
Tailles : Jean-Yves Ravoux, Nicolas Maire
Basse-taille : Christophe Gautier
Basses : Laurent Collobert, Julien Neyer
Viole de gambe : Myriam Rignol
Orgue : Florian Carré
Direction : Paul Agnew
Ce programme reprend deux des pièces données par les mêmes Arts Florissants et Paul Agnew à la Philharmonie il y a quelques mois... le résultat était magnifique et j'étais assez surpris de voir le résultat dans la cadre de l'église de Thiré, cadre beaucoup plus intime et à la réverbération plus importante que la Salle des Concerts de la Philharmonie de Paris.
Avec un chœur réduit, Paul Agnew donne encore plus de nuances et d'émotions aux deux œuvres proposées. Nous avons ici moins de volume mais beaucoup plus de finesse et de recueillement. La réverbération est aussi une partie importante du pouvoir évocateur de notre soirée... Chaque voix est ici parfaitement calibrée depuis les sopranos diaphanes et angéliques jusqu'à la puissance rude de la basse-taille.
Étrangement, la
Missa pro Defunctis est toujours coupée de son Pater Noster... mais le résultat semble toujours aussi magique. Cette messe est particulièrement variée avec des parties d'une sobriété sidérante alors que d'autres entrecroisent les lignes de chant pour une polyphonie magnifique.
Le
Stabat Matter est beaucoup plus sobre et fin, mais donne lui aussi toute sa force et sa délicatesse...
Ces deux pièces s'enchainent dans un silence recueilli et la tension est palpable durant tout le concert. Il faut dire que les partitions sont d'une grande force et les Arts Florissants se montrent à leur meilleur pour se subdiviser et s'assembler avec des couleurs irréelles ! Splendide d'un bout à l'autre... Et l'
Ave Verum est lui aussi superbe pour ce bis plein de sobriété.
A noter l'accompagnement des deux musiciens de très belle facture, mais souvent noyés par le chant.
22h – 22h20 : Méditations à l'aube de la nuitFrancesca Caccini : Maria, dolce Maria – O che nuovo stupor
Diego Ortiz : Recercata primera
Tarquinio Merula : Hor ch'è tempo di dormire
Soprano : Élodie Fonnard
Luth : Thibault Roussel
Viole de gambe : Myriam Rignol
Orgue : Benoît Harloin
Pour clore une longue journée, Paul Agnew nous a proposé des raretés... avec un lien sur les textes parlant de la vierge Marie.
Francesca Caccini est la fille du Caccini connu et elle propose deux pièces d'une grande douceur. Ils nous offrent un moment de repos et de calme... alors que l'hypnotique partition de Merula nous plonge dans la mort et les tourments de Jésus.
Les trois musiciens sont parfaits ici avec une grande sobriété... mais la plus grande réussite reste la prestation d’Élodie Fonnard qui ouvre des mondes par la finesse de son chant et les affects qu'elle fait ressentir. Malgré les textes en italiens, on est immédiatement en phase avec cette douceur ou cette douleur. Et tout le public rassemblé pour cet ultime concert est sous le charme.
Malheureusement, les spectateurs ne réussiront pas à faire durer le silence qui doit clore un tel concert : dès la sortie des musiciens, chacun fait du bruit et reprend sa conversation alors qu'on pourrait espérer un recueillement plus important.
Comme l'année dernière, la journée passée dans ces jardins reste un moment magique, où l'on vit entouré de musique et d'artistes si proches qu'on pourrait discuter avec eux. Mais il y a toujours ce respect... respect des lieux et des musiciens. Le public reste calme et discret durant les concerts.
Quelle grandiose idée d'avoir ouvert ces jardins et de proposer des journées si passionnantes !