Déroulé :
Introït – Hymne Lucis Creator Optime – (grégorien – Notre-Dame de Paris)
Kyrie – Messe vocale – Gounod
Graduel – Ave Maris Stella – Delibes
Gloria – Messe vocale – Gounod
Méditation (orgue seul)
Credo – Messe op. 4 – Saint-Saëns
Offertoire pour la Toussaint en Fa majeur – Saint-Saëns
Sanctus – Messe op. 4 – Saint-Saëns
Benedictus – Messe op. 4 – Saint-Saëns
Agnus Dei- Messe op. 4 – Saint-Saëns
Envoi – Hymne Te Lucis Ante Terminum
Les Sept paroles de Notre Seigneur Jésus-Christ sur la Croix – Gounod
Distribution :
Orgue : François Saint-Yves
Direction musicale : Hervé Niquet
Chœur : Concert spirituel
Création vidéo : Julien Ribes, François Dumesny (Artabase Studio)
Parfum d’atmosphère : Sentosphère
Illustrations d'extraits sonores scientifiques : Mylène Pardoen et Martin Guesney, PI2A-Audio/MSH-LSE/UAR2000/CNRS
Simulation acoustique de la cathédrale de Notre-Dame de Paris : Brian FG Katz, Sarabeth Mullins et Elliot Kermit Canfield-Dafilou, Institut d'Alembert, Sorbonne Université/CNRS
Prise de son de travaux dans l’enceinte de Notre-Dame de Paris, le 19 mai 2022 : Stéphane Oskeritzian
Après une pluie torrentielle, me voilà au Théâtre du Châtelet, où je n'avais pas mis les pieds depuis des années ! Le funeste présage de David s'est bien réalisé : la salle était particulièrement vide... Et pourtant : deux séances étaient prévues, la seconde a été annulée ; le second balcon et les amphithéâtres ont été fermés, pour rabattre les rares spectateurs entre le parterre, la corbeille et le premier balcon. Au final, la soirée m'aura coûté 7 €, pour un placement de catégorie 2 (plaisir coupable dont j'ai presque honte à force...).
Idée de départ très originale : plus un spectacle qu'un concert, c'est un son-lumière-odeur, sur un concept imaginé par Niquet. Étant arrivé bien en avance, j'ai pu profiter de la mise en ambiance sonore, visuelle et olfactive. Plafond et bordures de balcons avec projections lumineuses assez convaincantes. Mise en ambiance sonore réussie, mais pénible à moyen terme (bruits de travaux, captés sur le chantier réel de Notre-Dame... mais bon, des bruits de marteaux-piqueurs, ça va quelques minutes, surtout que je ne vais pas au concert pour ça, j'ai déjà des voisins qui font des travaux). Mise en ambiance olfactive plutôt ratée : odeur de brûlé pas très prégnante (pourtant l'ouvreuse l'annonce pour éviter que le public ne crie "au feu" pendant le spectacle). J'ai le souvenir du spectacle Au-delà des murs, de Catherine Lara, au Palais des Sports (en 2009 je crois) où il y avait une véritable mise en ambiance olfactive qui m'avait impressionné ! Pour les connaisseurs, l'odeur de samedi ressemblait à s'y méprendre à Révolution de la maison Trudon.
Sur scène, un rideau transparent sépare le chœur du public, rideau servant de support aux projections. L'organiste joue face au public, donc un peu caché derrière son instrument (je l'aurais mis devant la scène, légèrement en biais, mais sa position était la même pour le Requiem de Fauré au TCE cette année, avec le même Niquet). Niquet assis tout le concert. Chœur dans une demi-obscurité assez pénétrante. Tout ce petit monde est entré discrètement, pendant une animation sonore et visuelle.
Concert amplifié pour reproduire l'écho caractéristique de Notre-Dame de Paris : j'ai compté, la réverbération sonore prenait samedi entre 7 et 8 secondes, alors que la cathédrale offre une réverbération de 10 secondes habituellement (largement supérieure en tous cas à celle de la PP, entre 3 et 4 secondes). De là où j'étais assis, c'était parfaitement bien réalisé, bluffant ! Je n'aurais pas cru écrire ça un jour (préférer de la musique amplifiée, ça me semblait une hérésie). L'orgue profitait bien de cette configuration, avec un beau son majestueux.
Musicalement, c'était assez décevant : la marotte de Niquet étant de mélanger les mouvements de diverses œuvres, il était impossible de se repérer dans le programme. Impossible de déterminer si l'on entendait du Saint-Saëns, du Gounod ou autre chose (sauf le morceau de Delibes, dont le style, moins protocolaire, tranchait). Tous ces morceaux se ressemblaient furieusement, créant une sorte de mélasse sonore à mi-chemin entre hypnose et ennui. C'était bien chanté, pas de critique sur ce point, c'était simplement trop uniforme. Du coup, le concert en semblait long, pour "seulement" 1h20 de musique.
Néanmoins, le rythme de la soirée restait intéressant, avec les changements de décors lumineux : tour à tour, des vitraux, des rosaces, des peintures, des échafaudages, des enchevêtrements de planches et tuyaux, pour finir sur la célèbre gargouille absorbée dans ses pensées sur les toits de Paris. C'était vraiment très beau, très réussi, faisant voyager. Le décor resté le plus longtemps fut aussi le plus élégant : plafond bleu avec étoiles blanches, murs avec fleurs de lys dorées sur fond turquoise, rebords de balcons avec rayures dorées et rouges reproduisant des créneaux de château-fort... Remplissage famélique aidant, j'ai bien profité de la salle, et pris beaucoup de photos.
Finale : comme un bouquet de feu d'artifice, mélange des différents décors, de plus en plus rapide (à éviter pour les épileptiques), pour finir par des sons de cloches. Chœur, organiste et chef ont quitté la salle sans saluer, sous des applaudissements chaleureux, mais qui ont eu du mal à trouver leur place (je ne suis pas allé à la Messe depuis des années, donc j'ignore si l'on applaudit les musiciens). Public invité à quitter la salle alors que reprend l'ambiance sonore et visuelle trouvée au début.
Projet original, avec des moyens tangibles, bien réalisé. Un peu déçu par la musique, mais une expérience très intéressante et dépaysante !
Comme il faisait encore jour, et que mon regard a été happé par Notre-Dame sitôt sorti du Châtelet, je me suis promené, sous un joli soleil tombant en rasant les façades, dans des rues lavées par la pluie diluvienne qui a eu le bon goût de cesser pendant le spectacle.