PP - OPRF/Orozco-Estrada/Capuçon Elfman/Mahler - 20/05/2022

Programme :
Danny Elfman : Concerto pour violoncelle (création française)
Gustav Mahler : Symphonie n°5

Distribution :
Orchestre Philharmonique de Radio France
Andrés Orozco-Estrada, direction
Gautier Capuçon, violoncelle

Pas mal d'hésitations autour de ce concert. D'abord, pas réservé dans mon abonnement, puis ajouté pour le plaisir de voir Mikko diriger Mahler... puis Mikko remplacé par Orozco-Estrada (qui fut excellent dans Brahms / Bartok le mois dernier à RF), puis maintenu après m'être renseigné sur Elfman (musiques de films... possibilité que le concerto soit intéressant au fond...). Finalement, ce balancier entre enthousiasme et déception résume plutôt bien la soirée !

Elfman : attente palpable dans la salle, plutôt bien pleine ce vendredi. Mon voisin de devant avait ostensiblement sorti son téléphone pour enregistrer. Bruits de couloir autour de la présence possible du compositeur (apparemment, c'est une star que je ne soupçonnais pas).
Concerto plutôt décevant dans l'ensemble, malgré des passages élégants et quelques idées, notamment à l'orchestre. Globalement l’œuvre est beaucoup trop longue pour soutenir l'attention (annoncée 25 minutes sur le programme de salle, elle a bien duré 35 à 40 minutes, effet ressenti 1h30). Gauthier Capuçon se régale, le chef y met un engagement remarquable, mais on s'ennuie. Mon voisin de devant en a même éteint son enregistrement entre deux mouvements. Même Michel Orier présent au premier balcon n'a pas été attentif sur toute la longueur.
Longs saluts, nombreux hurlements du gros à chemise hawaïenne qu'on voit (et entend) régulièrement.
Pas de rappel.

Mahler : immense, majestueux, massif... jusqu'au mouvement lent, l'Adagietto, qui a tout brisé. C'est étrange que la postérité ait retenu ce mouvement en particulier, à cause du film de Visconti, car ce n'est pas le plus saisissant. Premiers mouvements vraiment notables : chef à l'engagement inouï, sans aucun relâchement. Orchestre parfait, y compris les solos de trompette, savonnés dans la précédente audition de cette symphonie (PP/OP/Mäkelä, seule précédente expérience d'ailleurs, me concernant).
Mouvement lent pris vraiment très lentement, traînant en une longueur paraissant infinie, qui coupe toute possibilité de rester concentré et habité. Dernier mouvement, avec un crescendo irrésistible ; mais difficile, voire impossible, de retrouver l'enthousiasme du début lorsque le charme est rompu (comme une tentative de me ré-hypnotiser, alors que je suis réveillé). Je me suis surpris à regarder plusieurs fois ma montre, alors que c'était censé être le meilleur moment de la soirée.

Je retiens tout de même un chef exceptionnel, enthousiasmant, d'un dynamisme forçant le respect. L'occasion d'une discussion intéressante avec Mickt !

Impressions très semblables à Rocktambule.

Long concerto, une purge : une sorte d'hommage calqué à Chostakovitch, en particulier son 1er concerto pour violon (cité par Elfman dans le programme de salle). Quatre mouvements, succession attendue et conventionnelle de passages lents éplorés et de passages tumultueux, ambiance grave. On a droit au mouvement de longues nappes étales pour cordes seules, aux touches de célesta. Les thèmes sont peu marquants. Pourtant Capuçon était impressionnant d'engagement et de dextérité, et le chef et l'orchestre étaient au diapason.

Une belle 5e dans l'ensemble : les trois premiers mouvements surtout, d'une belle puissance tout en préservant les équilibres et en maintenant un discours lisible. Ça manquait peut-être d'abandon, d'esprit, de folklore, mais c'était d'excellente tenue. L'Adagietto en revanche assez plombant, étiré de façon exagérée. Le final a peiné à renouer le fil, c'est resté assez sage. Malgré tout je retiens une lecture intense et bien articulée.

Rocktambule a écrit:

Mon voisin de devant avait ostensiblement sorti son téléphone pour enregistrer. Bruits de couloir autour de la présence possible du compositeur

Le type devant moi a quant à lui lancé son application Grindr à peine le concerto terminé et ne s'est pas revu après l'entracte.

Citation :

Elfman : attente palpable dans la salle, (apparemment, c'est une star que je ne soupçonnais pas).

C'est le compositeur attitré de Tim Burton et il a écrit plein d'autres musiques de films et de séries. Le générique des Simpsons et la B.O. de L'Étrange Noël de M. Jack sont dans mon panthéon.

Et Batman aussi.

Ça arrive souvent aux compositeurs de musique de film qui ont une commande de concert : ils veulent à tout prix faire sérieux, et ça plombe leur inventivité, en se piégeant d'eux-mêmes dans un moule imaginaire – alors que si on aime leur musique, on ne leur en voudra pas d'écrire un concerto de forme très rhapsodique, façon Fantaisie hongroise de Liszt…