Votre dernier film visionné

Golisande a écrit:

Voilà, j'ai vu ce film en entier et c'est d'ores et déjà un de mes Hong Sang-soo préférés, d'une poésie et d'une délicatesse extrêmes... La fin, et Kim Min-hee... C'est comme si tout le charme dont elle jouait de façon presque excessive (et affectée jusqu'à son "naturel" même) dans les deux films de 2017 était ici concentré, épuré, rendu à une sorte d'innocence primordiale... Rien à dire, c'est parfait et vraiment très beau...

Je n'ai pas encore assez de recul (et je regrette vraiment de l'avoir vu en deux fois), mais il n'est pas impossible que ce film soit un chef-d'œuvre, peut-être même le chef-d'œuvre de HSS...

Spoiler:

En fait, je viens de me rendre compte que je me suis trompé de film  (il en sort tellement et puis parfois avec les titres français qui n'ont rien à voir...), je voulais parler de La femme qui s'est enfuie ; celui dont tu parles, je ne l'ai pas détesté mais il m'a plutôt laissé de marbre - à part peut-être la fin qui va des personnalités vers les personnes.

La Mort aux trousses (1959) Alfred Hitchcock





Mon préféré du Maître.

Jaco van Dormael : Toto le héros        1991

 +
Avant de réaliser son tube cinématographique, van Dormael avait réalisé ce film (qui est d'ailleurs son premier long-métrage) assez vertigineux. L'idée est pourtant toute simple : un vieil homme (interprété par Michel Bouquet, très bien) est persuadé depuis qu'il est petit qu'il a été échangé avec un autre garçon et ce, à la naissance ; cet autre garçon est beaucoup mieux loti et a reçu les honneurs, une jalousie est alors apparue qui le poussera jusqu'au meurtre maquillé en suicide qui ouvre le film. Le point fort de ce film, c'est son montage très dynamique, tout en flashbacks et c'est intéressant car on dirait que c'est un peu la manière dont le personnage de Bouquet donne du relief à sa vie, si l'on retire ça, il y a rien - et d'ailleurs le film tombe aussi ; de ce point de vue-là, c'est assez chouette mais du coup, j'ai trouvé qu'il manquait un peu de quelque chose.

Frank Beauvais : Ne croyez surtout pas que je hurle        2019

 +
J'ai été vraiment déçu par ce film mais je pense que c'est parce qu'il y a eu mé/incompréhension dès le départ. Dans ce film (son premier), Beauvais raconte quatre années de sa vie durant lesquelles il a vécu plus ou moins reclus dans un village complètement isolé (d'après sa description) en Alsace (puis il raconte aussi son retour à Paris vers la fin) ; durant ces quatre années, il passait essentiellement son temps à regarder (et télécharger) des films, tout ce qu'il pouvait trouver. Tous ces films vont être utilisés comme un papier-peint, ils ont eu de l'interaction mais n'auront d'interaction que très littérale/illustrative dans le récit et c'est là que j'ai été déçu : je ne comprends pas trop l'intérêt. Si on ne les utilise pas, quel est l'intérêt de faire appel à des images ? peut-être était-ce pour faire une teinte atmosphérique au récit en voix-off (monocorde) du réalisateur ? à un moment, le réalisateur dit qu'il s'en sert comme d'un "miroir et non d'une fenêtre" ; j'imagine que pour lui, c'était aussi un geste libérateur, qui n'a peut-être pas la charge du texte écrit seul. Malgré quelques séquences qui m'ont plu (notamment celle à propos de son père et du film Le ciel est à vous de Grémillon), je me suis tout de même ennuyé.

Le Roussillon à la veille de la Révolution Française. Masqué d'un ruban et surnommé "la Tulipe noire", un jeune aristocrate s'en prend aux nobles de la région en les dépouillant de leur fortune. Lors d'une altercation avec la police, il est marqué au visage. Ne pouvant plus assurer son anonymat, il demande à son frère jumeau et parfait sosie de prendre le relais.
J'adore ce film là, que de la bonne humeur...
Des acteurs de la grande époque, bref c'est une réussite totale !

Diane Sara Bouzgarrou : Je ne me souviens de rien        2017

 +
Ce documentaire commence fin 2010, période où Bouzgarrou traverse un épisode maniaco-dépressif et entre en clinique psychiatrique. Elle n'a visiblement plus vraiment de souvenirs de cette période, heureusement, elle a des archives : des carnets de notes, des moments filmés, des photos, des dessins, etc. Dans ce film, elle essaie de recoller les morceaux grâce à ces archives stockées dans l'ordinateur de son copain ; le film met l'accent sur les variations brutales d'humeur et je trouve qu'au-delà des variations de l'humeur (liées à la bipolarité) de la réalisatrice même, ces variations étaient sensibles dans la nature des archives : je pense par exemple à ces écrans noirs sur lesquels la réalisatrice tape du texte qui sont en général assez en rupture et qui sont surtout des espaces où se rencontrent explicitement les deux mémoires. En plus de ça, la fin est vraiment chouette avec cette séquence rouge où elle retire des fragments de visage collés sur son propre visage avec le texte conclusif en voix-off puis cette longue séquence fixe.

[Hong Sang-soo]

Emeryck a écrit:

La femme qui s'est enfuie

J'ai vu celui-là aussi, et j'ai adoré, mais tout de même moins que the Novelist's film; ça m'a semblé un peu plus anecdotique, même si la fin est là aussi d'une beauté renversante.

Je découvre avec un enchantement total ce volet léger (je dirais plutôt délicat, car la gravité est bien présente notamment dans ces "codas" incroyables) de la dernière manière du réalisateur — très différente à la fois de ses films précédents, et de sa veine récente plus sombre qui m'avait pas mal défrisé...

(Ah, et – le mot "coda" m'est venu spontanément – je me rends compte que je regarde ces films, comme tous ceux que j'aime le plus, à peu près exactement comme j'écouterais de la musique..)

Derek Jarman : Blue        1993

 +
Ce film est l'ultime film de Jarman (et le premier que je vois) qui mourra du SIDA quelques mois après ; le point de départ de ce film, c'est la séropositivité de Jarman et notamment la cécité à laquelle il fait par conséquent face - dans ses écrits, il dit voir au travers d'un filtre bleu ; à l'image, le film sera donc composé d'un unique écran, complètement bleu de Klein. Bien sûr, la bande-son est là où tout fourmille : on a des extraits de poèmes écrits par le réalisateur, des extraits de son journal intime (où il parle de ses traitements et de leurs effets), des articles de presse lus, le tout étant lu par des voix différentes (Derek Jarman lui-même mais aussi Tilda Swinton, Nigel Terry ou John Quentin) et ponctué par divers interludes musicaux toujours liés au texte. Dans cette fresque textuelle, on trouve également tout un groupe de fond : lié aux multiples séquences où Jarman parle de la déclinaison de sa vue, il regroupe des séquences où le réalisateur médite sur la couleur bleu (et c'est en général à ça qu'est soumise la logique des intermèdes musicaux) ; c'est comme s'il s'agissait de se constituer ce couloir de repli jusqu'au bleu - cet aspect progressif étant marqué par les apparitions ponctuelles des nouvelles (rapports et journaux). En plus de ça, j'ai trouvé le texte vraiment chouette par endroits ; j'avais peur de m'ennuyer un peu mais en fait, si on a un pied dedans, c'est bon. Je suis assez curieux de voir à quoi ressemble les autres films de Jarman - ils sont sans doute assez différents.

Pachy a écrit:

Le Roussillon à la veille de la Révolution Française. Masqué d'un ruban et surnommé "la Tulipe noire", un jeune aristocrate s'en prend aux nobles de la région en les dépouillant de leur fortune. Lors d'une altercation avec la police, il est marqué au visage. Ne pouvant plus assurer son anonymat, il demande à son frère jumeau et parfait sosie de prendre le relais.
J'adore ce film là, que de la bonne humeur...
Des acteurs de la grande époque, bref c'est une réussite totale !

Revu cet été.
Les combats ont quand même très mal vieilli, du niveau de Thierry la Fronde...

Emeryck a écrit:

Derek Jarman : Blue        1993

 +
Ce film est l'ultime film de Jarman (et le premier que je vois) qui mourra du SIDA quelques mois après ; le point de départ de ce film, c'est la séropositivité de Jarman et notamment la cécité à laquelle il fait par conséquent face - dans ses écrits, il dit voir au travers d'un filtre bleu ; à l'image, le film sera donc composé d'un unique écran, complètement bleu de Klein. Bien sûr, la bande-son est là où tout fourmille : on a des extraits de poèmes écrits par le réalisateur, des extraits de son journal intime (où il parle de ses traitements et de leurs effets), des articles de presse lus, le tout étant lu par des voix différentes (Derek Jarman lui-même mais aussi Tilda Swinton, Nigel Terry ou John Quentin) et ponctué par divers interludes musicaux toujours liés au texte. Dans cette fresque textuelle, on trouve également tout un groupe de fond : lié aux multiples séquences où Jarman parle de la déclinaison de sa vue, il regroupe des séquences où le réalisateur médite sur la couleur bleu (et c'est en général à ça qu'est soumise la logique des intermèdes musicaux) ; c'est comme s'il s'agissait de se constituer ce couloir de repli jusqu'au bleu - cet aspect progressif étant marqué par les apparitions ponctuelles des nouvelles (rapports et journaux). En plus de ça, j'ai trouvé le texte vraiment chouette par endroits ; j'avais peur de m'ennuyer un peu mais en fait, si on a un pied dedans, c'est bon. Je suis assez curieux de voir à quoi ressemble les autres films de Jarman - ils sont sans doute assez différents.

C'est assez expérimental, enfin ça dépend de quels films on parle, on peut trouver son œuvre inégale il y a des choses que je trouve assez pénible (the angelic conversation sur les sonnets de Shakespeare c'est beau mais a terme un peu monotone et assez long, j'avais été un peu déçu par Jubilee son film "punk") mais aussi des films vraiment magnifique: très beau souvenir du War Requiem, de Caravaggio, de La tempête (il est assez difficile celui là quand même), d'Edward II, de Wittgenstein (j'aimerais beaucoup voir des œuvres plus expérimentales comme The Garden ou The Last of England). Sinon si tu as aimé les texte de Jarman dans son dernier film je conseille de lire ses différents journaux, mais je ne sais pas si c'est traduit en français par contre.

Parsifal a écrit:

Emeryck a écrit:

Derek Jarman : Blue        1993
 +
Ce film est l'ultime film de Jarman (et le premier que je vois) qui mourra du SIDA quelques mois après ; le point de départ de ce film, c'est la séropositivité de Jarman et notamment la cécité à laquelle il fait par conséquent face - dans ses écrits, il dit voir au travers d'un filtre bleu ; à l'image, le film sera donc composé d'un unique écran, complètement bleu de Klein. Bien sûr, la bande-son est là où tout fourmille : on a des extraits de poèmes écrits par le réalisateur, des extraits de son journal intime (où il parle de ses traitements et de leurs effets), des articles de presse lus, le tout étant lu par des voix différentes (Derek Jarman lui-même mais aussi Tilda Swinton, Nigel Terry ou John Quentin) et ponctué par divers interludes musicaux toujours liés au texte. Dans cette fresque textuelle, on trouve également tout un groupe de fond : lié aux multiples séquences où Jarman parle de la déclinaison de sa vue, il regroupe des séquences où le réalisateur médite sur la couleur bleu (et c'est en général à ça qu'est soumise la logique des intermèdes musicaux) ; c'est comme s'il s'agissait de se constituer ce couloir de repli jusqu'au bleu - cet aspect progressif étant marqué par les apparitions ponctuelles des nouvelles (rapports et journaux). En plus de ça, j'ai trouvé le texte vraiment chouette par endroits ; j'avais peur de m'ennuyer un peu mais en fait, si on a un pied dedans, c'est bon. Je suis assez curieux de voir à quoi ressemble les autres films de Jarman - ils sont sans doute assez différents.

C'est assez expérimental, enfin ça dépend de quels films on parle, on peut trouver son œuvre inégale il y a des choses que je trouve assez pénible (the angelic conversation sur les sonnets de Shakespeare c'est beau mais a terme un peu monotone et assez long, j'avais été un peu déçu par Jubilee son film "punk") mais aussi des films vraiment magnifique: très beau souvenir du War Requiem, de Caravaggio, de La tempête (il est assez difficile celui là quand même), d'Edward II, de Wittgenstein (j'aimerais beaucoup voir des œuvres plus expérimentales comme The Garden ou The Last of England). Sinon si tu as aimé les texte de Jarman dans son dernier film je conseille de lire ses différents journaux, mais je ne sais pas si c'est traduit en français par contre.  

Merci !

Andrzej Żuławski : L'amour braque        1985

 + / 
En lançant ce film, je ne savais pas du tout à quoi m'attendre et puis de toute façon, je crois que je n'aurais jamais deviné un truc pareil : au début, il y a un peu une atmosphère dans le genre de celle de Le voyou de Lelouch (la scène d'ouverture) à ceci près qu'elle dure tout le film ; en fait, on pourrait peut-être dire que c'est Les amants du pont Neuf qui aurait croisé un film de casse genre Melville et un film de Godard - ah oui, et sans oublier qu'il s'agit d'une adaptation (libre) de L'idiot de Dostoïevski. Bon, sinon, j'ai pas trop compris ce que ça racontait (et je crois que ça ne m'intéresse de toute façon pas trop) : au début, le film m'amusait mais je trouve que ça finit par lasser un peu - et puis d'un point de vue sonore, ça devient fatiguant. En revanche, du point de vue technique, c'est très fort et je trouve qu'il y a vraiment un paquet de plans colorés vraiment très beaux. À côté de ce film, je crois que Possession est en fait très calme et sage.

Accusé d'avoir abusé de sa propre soeur, Sonny Bronston, un voleur de chevaux, se voit traqué sans répit par le valeureux Hiram Coburn.
Funny mais sans plus...

Je continue la série :



Toujours beaucoup de plaisir à voir ça pour ma part, mais pour le coup ça me semble assez mineur dans la filmographie de HSS (avec parfois quelques "nouvellevagueries" agaçantes, comme cette femme qui monte et descend un escalier pendant cinq minutes avec de plus en plus d'enthousiasme : métaphore ok (clignotant rouge), mais sur 66 minutes de film la question de la pertinence peut se poser — quoique ne goûtant pas spécialement ce genre de séquences, ça ne me gêne pas quand c'est dans un film de Rivette de trois heures ou (beaucoup) plus, où le temps est comme un personnage à part entière)...

En revanche l'utilisation inhabituelle de la musique classique (diégétique puisqu'il est censé s'agir des musiques diffusées dans le café où est tourné la plus grande partie du film) est originale et intéressante, notamment le prélude de Lohengrin entendu deux fois intégralement et dont l'expressivité propre apporte un contrepoint émouvant et subtil aux scènes vues à l'écran — la subtilité venant du fait que cette musique totalement romantique serait incongrue en extradiégétique, alors que sa présence pour ainsi dire "accidentelle" permet un télescopage d'émotions assez fascinant : c'est clairement ce qui m'a le plus passionné dans ce film.

Pour le reste, bien que ne connaissant pas encore bien la filmographie tardive de Hong, la tonalité globale assez crépusculaire rattache semble-t-il cet opus de 2018 à ceux qui le précèdent immédiatement (et que j'ai nettement moins aimés), quoique la prestation de Kim Min-hee (toujours au centre) soit bien plus sobre et introvertie, et que le minimalisme épuré de l'ensemble annonce – en moins abouti à mon sens, et sans "coda" particulièrement marquante – les films des années 2020...
J'ajoute tout de même que les acteurs sont comme toujours extraordinaires, ainsi que la finesse d'observation (et souvent la cruauté) des rapports entre les "figures" qui ici sont à peine des personnages et pourtant existent (j'insiste) avec une force incroyable (notamment celle du vieil acteur, franchement bouleversante)...

Autrement dit on est toujours dans le très très haut du panier, même si ce film me semble (du moins pour le moment) moins essentiel que d'autres; mais il m'en reste un petit paquet à voir, ce dont je suis ravi.

Delphine Gleize : Sale battars        1998


Ce court-métrage d'une vingtaine de minutes est la première réalisation de Gleize, il raconte l'histoire d'une jeune fille de la campagne picarde qui, pour le mariage de sa grande sœur, décide de donner à son grand frère handicapé un rôle un peu solennel, celui d'accompagner la mariée jusqu'à l'autel. On suit alors d'une part les séquences où la petite sœur entraîne son frère à être stable sur ses deux jambes et d'autre part, les remarques désobligeantes et validistes de pas mal de personnes.

Pendant qu'Obélix s'ennuie au village, César envahit la Grande-Bretagne et balaie ses adversaires. Seul le petit village de Zepigbes résiste et envoie Jolitorax, le cousin d'Astérix, chercher du secours en Gaule. Astérix et Obélix, accompagnés d'Idéfix, décident alors de l'aider à ramener Outre-Manche un tonneau de potion magique. Malgré les précautions, leur anonymat est percé et le tonneau saisi par les Romains qui raflent tous les tonneaux de Londres.
C'est un de mes préférés celui-ci...
Je lui préfère le livre, mais le film est bien aussi !

Aïda & Jacques Kébadian : Buvards        1979


Ce court-métrage d'une petite dizaine de minutes met en lumière plusieurs œuvres de la peintre Aïda Kébadian, la sœur de Jacques Kébadian. Le film est une co-réalisation du frère et de la sœur et j'ai trouvé le procédé intéressant car c'est une sorte de film d'animation a posteriori : les tableaux étaient bien sûr déjà là avant le projet du film mais il s'agit de les grouper ensemble pour raconter une histoire - ceci étant facilité par le fait que ses tableaux soient figuratifs.

Charlie Chaplin : A woman of Paris        1923


Ce film est le deuxième long-métrage de Chaplin et entend bien faire un pas de côté par rapport à The kid et il l'explique par un intertitre en préambule : il n'a pas de rôle de premier plan dans ce film (il fera un petit caméo) et que ce serait un film dramatique (bon, par contre, pour moi, The kid est aussi un drame) ; en tout cas, sur ce point, ce qui est effectif, c'est que le jeu des acteurices est beaucoup plus retenu. J'ai beaucoup aimé la manière dont le film jouait de l'espace (notamment via des symétries axiales et centrales) et des décalages pour créer sa dramaturgie : d'abord, l'exclusion de Marie par son père puis le fait qu'elle ne soit pas acceptée par les parents de Jean (symétrie axiale) puis la mort du père de Jean (décalage) qui conduit Marie à partir seule pour Paris puis elle se trompe d'immeuble pour la soirée au quartier latin (ah oui, le film se passe en France, au fait) ce qui l'amène à retrouver Jean qu'elle avait perdu de vue pendant environ un an (là encore, beaucoup de décalages : Jean est toujours peu fortuné alors que Marie évolue maintenant parmi la bourgeoisie parisienne et puis, en terme de décalage, il y a aussi l'erreur sur l'immeuble) ; on retrouve également un décalage dans la scène (que j'aime beaucoup) où Marie demande à Jean de la peindre et que celui-ci la peint dans l'habit qu'elle portait lorsqu'il l'a accompagnée à la gare. Toute cette dramaturgie schématique est à mon sens vraiment effective (et puis elle part tout de même du réel : la disjonction Paris/province puis l'existence de plusieurs classes sociales, ce sont les deux points d'impulsion du récit) et la fin forme une synthèse assez admirable où l'on retrouve un peu toutes les transformations à l'œuvre auparavant notamment à travers la dernière séquence où Marie et Pierre se croisent sur la route de la campagne tous deux dans des directions opposées sans s'en rendre compte (décalage puis symétrie centrale), c'est comme si la disparition de Jean avait transformé toutes les symétries axiales en symétries centrales - elle constitue le dernier point d'impulsion du récit, celui qui lance la coda mais c'est une synthèse des deux autres. Ce film fut un échec à sa sortie mais pour moi, c'est un grand Chaplin, beau et très efficace.

L'Affaire Thomas Crown (1968) Norman Jewison



   

Un neuroscientifique dont la famille est tuée dans un accident de voiture utilise ses connaissances pour tenter de les ramener à la vie. Mais le gouvernement et la police s'y opposent.
Le film est très lent au démarrage, mais reste encore intéressant à voir !

Alain Corneau : Tous les matins du monde        1991


Ce film est une adaptation du roman du même nom de Pascal Quignard, il raconte les relations entre Monsieur de Sainte-Colombe, un joueur de viole renommé (et qui a fait évoluer la viole d'un point de vue technique), et celui qui voulait être (et sera apparemment, brièvement) son élève (et le compositeur que l'on sait) Marin Marais. Le film est un grand flashback où Marin Marais raconte sa rencontre (assez tumultueuse et qui semble surtout animé par un sentiment ambivalent de la part de Sainte-Colombe : à la fois une jalousie pour le talent de Marais mais le jeu de Marais le touche immédiatement) avec Sainte-Colombe et sa famille (plus commode que lui). J'ai bien aimé le film et notamment tous les moments où de la musique est jouée, j'ai bien aimé la prestation de Marielle et celle de Guillaume Depardieu (Gérard Depardieu n'est pas mal mais on sent déjà qu'il fait plus ça par-dessus la jambe - même si la scène des pleurs alternés entre Marais et Sainte-Colombe à la fin est belle) ; mention spéciale pour la très belle photographie d'Yves Angelo qui fait des merveilles dans les séquences se déroulant aux heures extrémales du jour - et je trouve que ça va assez bien avec la vie très solitaire de Sainte-Colombe.

Georges Méliès : Le voyage dans la Lune        1902

 + / 
Je n'avais pas encore vu ce film (ni même un seul film de Méliès, en fait) ; j'ai vu la version colorisée (qui a longtemps été considérée comme perdue mais qui a été restaurée il y a une petite vingtaine d'années) et c'est vraiment un délire. Bon, on ne va pas en remettre des tartines sur la disjonction Lumière/Méliès mais dans ce film, c'est dingue à quel point tout est tourné vers ce qui n'existe pas et puis je trouve qu'il y a aussi une démarche de départ (en plus d'une dimension profondément active) : il ne s'agit pas de fixer mais d'atteindre - et puis, bon, tout de même, c'est un sacré trip dans la version colorisée. Bref, je suis content d'avoir vu ce film, j'ai passé un bon moment.

Yann Gonzalez : Les rencontres d'après minuit        2013

 +
Ce film est le premier long-métrage de Gonzalez et j'avoue que je ne sais pas trop quoi dire : Gonzalez est un grand connaisseur du bis, du cinéma queer ainsi que du cinéma érotique et porno, il adore ça et ça se sent ; Gonzalez est aussi quelqu'un qui a des idées visuelles, qui sait composer des ambiances et qui sait comment on fait de beaux plans. En revanche, je trouve vraiment qu'il ne sait pas écrire des histoires (c'est un peu moins le cas dans son long-métrage suivant, Un couteau dans le cœur) : ici, j'ai trouvé que le film n'allait vraiment nulle part, il enchaîne les circonvolutions toutes plus inutiles les unes que les autres (je conseille de lire la section Plot de la page Wikipédia en anglais consacrée à ce film pour se rendre compte) et je crois que le pire, ce sont les dialogues que je trouve assez emphatiquement creux (""toujours" m'ennuie à mourir, moi c'est "maintenant" qui m'intéresse" ou tout un tas de truc sur les rêves, il faut les suivre, etc.). Pourtant, il y a des choses que je trouvais intéressante : ce primat sensoriel (la scène d'ouverture, à cheval entre Querelle et Scorpio rising : la passagère demande au conducteur qui il est, il ne répond pas, elle glisse sa main dans sa bouche et elle le reconnaît, le film glisse vers autre chose) ; il y a également ce jukebox qui associe une musique supposée correspondre à la main qui se pose sur lui ; la toucher semble à la fois avoir une fonction jointive et une fonction expansive - il semble s'agir de constituer un autre régime sensible, je pense par exemple à la séquence où La Star arrive et demande à ce qu'on éteigne toutes les lumières. Tout ce que j'évoque là est plutôt une extrapolation de ce que l'on peut trouver dans le film et c'est ce que j'aurais aimé y trouver, le film me semble de fait assez limité.

Tout ça est aussi immense qu'infinitésimal, aussi abyssal que vaporeux, il y a tout avec rien, c'est prodigieux et je ne veux plus voir que des films comme ça, voilà.

Vu au cinéma aujourd'hui avec mon fils...
Mouais pas trop mal, j'aime bien la scène avec le Bouc démoniaque
Mais je lui préférais le premier film

Diamants sur canapé (1961) Blake Edwards





Heureusement que le film se termine d'une manière plus optimiste que dans le roman original.

Lyncoln Rhyme, un ancien criminologue, s'est retrouvé paralysé suite à un accident. Il se retrouve, malgré lui, mêlé à une affaire de meurtres.
Ah celui-ci, c'est du tout bon...
De formidables acteurs !
À voir absolument !

Aki Kaurismäki : Les feuilles mortes        2023


C'est la première fois que je découvrais un film de Kaurismäki en salle, je savais grosso modo à quoi m'attendre et c'est effectivement ce que j'ai vu mais je sais pas, j'ai trouvé qu'il s'embarrassait encore de moins de choses, non pas que ce soit d'habitude la profusion qui règne mais là, il veut nous raconter l'histoire de cette double pair de personnages eh bien, il y va : un bar qui fait des soirées karaoké où l'on chante aussi bien une chanson populaire finlandaise, qu'un lied de Schubert ou du hard-rock ; les gens se rencontrent, iels n'osent pas trop, ils se lancent. Ce qui m'a beaucoup touché dans ce film, c'est sa spontanéité : les personnages ont leurs problèmes (qui ont souvent des explications assez terre-à-terre) : les relations marchent parfois et parfois ne marchent pas, ça varie, mais ce n'est pas grave, c'est comme ça. Je trouve que cette sincérité se retrouve aussi dans la façon de parler des travailleur/ses : ce sont des prolétaires et ce n'est pas l'objet du film mais plutôt un point de départ - les deux personnages du duo le plus mis en avant sont tous deux définis en tant que prolétaires ; iels sont fatigué(e)s et subissent la domination (et parfois l'abjection - aux conséquences très concrètes) de leur patron mais iels vivent. J'ai également beaucoup aimé l'utilisation des couleurs, la gestion de l'espace dans les cadres (cette manière de faire sentir doucement la solitude), les touches d'humour (assez nombreuses, finalement - sans doute plus nombreuses qu'à l'accoutumée) et la bande-originale ; enfin, bref, pas de doute, on est bien dans un film de Kaurismäki, ça m'a donné envie de revoir ses films comme Au loin s'en vont les nuages, Ombres au paradis ou Ariel.

Michel Lemoine : Les week-ends maléfiques du comte Zaroff        1976

 /   +
Je ne connaissais jusque-là Michel Lemoine qu'en tant qu'acteur - et puis aussi de nom car il est tout de même assez culte dans le milieu du bis français des années soixante-dix, avec un parcours pas si éloigné de celui de Jean Rollin même si leurs influences sont tout de même assez différentes, j'ai d'ailleurs l'impression que Lemoine est moins intéressant que Rollin (chez le second, la thématique des vampires est centrale - et puis l'influence de Corbière et du feuilleton - alors que chez le premier, c'est juste des films d'abord érotiques et celui est sans doute celui qui déroge le plus à cette logique) et puis je crois qu'il a également plus de budget. Ce film raconte l'histoire du comte Zaroff, le dernier descendant d'une famille d'aristocrates décadents et qui, en quelque sorte, perpétue la tradition familiale de partir à la chasse aux personnes nues (principalement des femmes) pour les torturer dans le sous-sol de son château. S'il ne filmait pas à de multiples reprises des femmes nues seules à l'écran avec une grande complaisance, on aurait presque pu croire que ce film critiquait la classe bourgeoise (en particulier, les traditions se transmettant de générations en générations et puis aussi l'exploitation) mais bon, ce n'est pas la direction qu'a choisi de prendre le film. La manière dont le film a été filmé est également assez curieuse : il y a des séquences (assez brèves, souvent oniriques ou transitoires - je pense par exemple à celle de l'entrée dans le château ou à celle du jet du corps dans l'étang) vraiment aventureuses qui ne préviennent pas (le grand angle anamorphosant de la séquence d'entrée au château, ça fait son effet !) alors qu'à côté, on a des séquences érotiques complètement lisses parfaitement inintéressantes. Le film a été également amputé d'une cinquantaine de minutes, je me demande à quoi ressemblait la version initiale - en espérant qu'ils aient coupé seulement des scènes érotiques.

Vsevolod Poudovkine & Nikolaï Chpitovsky : La fièvre des échecs        1925


Ce court-métrage d'une vingtaine de minutes est vraiment amusant : il met en scène Moscou visiblement prise d'assaut par un tournoi international d'échecs ; le personnage principal est un homme obsédé par les échecs (c'est assez marrant, il vit vraiment dans un monde à carreaux : chaussettes à carreaux, béret à carreaux, il joue seul aux échecs et puis il y a cette scène où il se retrouve seule dans une pièce carrelée en noir et blanc. Le personnage de sa femme est également assez amusant : elle en a ras le bol des échecs (forcément) et elle finit (non sans mal) à trouver un gars qui en a aussi marre des échecs - ce qui est assez drôle car le gars (José Raul Capablanca) qui joue le rôle de ce personnage est un véritable champion d'échecs à la fin des années 10 et au début des années 20. Bref, rien d'extrêmement profond dans ce court mais c'est vraiment marrant (et enlevé) : une bonne porte d'entrée dans le cinéma de Poudovkine que je ne connais pas encore.

Gérald Belkin : Le candidat        1968

Deuxième excursion dans la filmographie de Belkin et ce n'est pas beaucoup plus marquant ; ce film est sans doute un tout petit peu mieux mais je crois que je lui reprocherais essentiellement les mêmes choses qu'à Opus 007 : c'est trop général et on ne comprend donc pas trop bien ce que ça raconte ou alors ce sont des trucs très généraux qui ne sont pas très intéressants. Ce court parle des élections (en politique) et de la tournure très idolâtrante que ça peut prendre. Pour moi, ça ne tient compte de que quelques types d'élections et même au-delà de ça, ce n'est vraiment pas une grande découverte et pour moi, il n'y a pas grand-chose d'autre de très significatif dans ce court.

Cet après-midi :

Vacances romaines (1953) William Wyler





Ce soir :

Charade (1963) Stanley Donen



 

Moonraker
Réalisation Lewis Gilbert
Scénario Christopher Wood
Musique John Barry
Acteurs principaux
Roger Moore
Michael Lonsdale
Lois Chiles
Richard Kiel
Corinne Cléry

Un des plus interessants pour moi,des nombreux James Bond.Bien que j'ai toujours préfèré Sean Connery comme James Bond,ce Bond là ne manque pas de piment ni d'intèrêt.D'ailleurs ,on voyage beaucoup dans ce film et l'on ne s'en plaindra pas et les femmes ,sont aussi nombreuses et belles.La production étant en partie française nous donne la chance de voir un Michael Lonsdale dans le meilleur de sa forme et inquiètant à souhait, dans une sorte de savant fou,qui a une idée de l'eugénisme assez particulière.La science-fiction est à la base de Moonraker et c'est assez bien fait.Les effets spéciaux sont assez crédibles,pour suivre le film jusqu'au bout.Il paraît que Star Wars est passé par là, d'après Wikipédia.Requin est vraiment formidable et il lui suffit d'être là et totalement  increvable , pour nous satisfaire tellement il est hors-normes.Tout comme James Bond, c'est fou, comme ses poursuivants peuvent être de mauvais tireurs et lui s'en joue à merveille et s'en sort parfois, un peu trop facilement.Bref , un Bond qui se laisse voir et qui a marqué son époque.Quelques  notes rapides sur un film, que j'ai vu et revu.

gluckhand a écrit:

Moonraker
Réalisation Lewis Gilbert
Scénario Christopher Wood
Musique John Barry
Acteurs principaux
Roger Moore
Michael Lonsdale
Lois Chiles
Richard Kiel
Corinne Cléry

Un des plus interessants pour moi,des nombreux James Bond.Bien que j'ai toujours préfèré Sean Connery comme James Bond,ce Bond là ne manque pas de piment ni d'intèrêt.D'ailleurs ,on voyage beaucoup dans ce film et l'on ne s'en plaindra pas et les femmes ,sont aussi nombreuses et belles.La production étant en partie française nous donne la chance de voir un Michael Lonsdale dans le meilleur de sa forme et inquiètant à souhait, dans une sorte de savant fou,qui a une idée de l'eugénisme assez particulière.La science-fiction est à la base de Moonraker et c'est assez bien fait.Les effets spéciaux sont assez crédibles,pour suivre le film jusqu'au bout.Il paraît que Star Wars est passé par là, d'après Wikipédia.Requin est vraiment formidable et il lui suffit d'être là et totalement  increvable , pour nous satisfaire tellement il est hors-normes.Tout comme James Bond, c'est fou, comme ses poursuivants peuvent être de mauvais tireurs et lui s'en joue à merveille et s'en sort parfois, un peu trop facilement.Bref , un Bond qui se laisse voir et qui a marqué son époque.Quelques  notes rapides sur un film, que j'ai vu et revu.

Ouï étant un grand fan de JB, je dis
Mais c'est aussi avec ce film que l'époque de 007 change...
Pour moi, c'est pas vraiment un problème, mais je lui préférais avant...
Maintenant, faut voir pour le prochain acteur ?

Pas de printemps pour Marnie (1964) Alfred Hitchcock



 

Die Hard 3



Etonnant: à 1h40 et quelques secondes, plagiat absolu des Fonderies d'acier de Mossolov pendant 15 secondes dans la BO!! (mais vraiment, à la note!)

Sebastián Silva : Crystal fairy        2013

 +
C'est le premier film de Silva que je vois et à la vue du titre, je m'attendais à quelque chose d'un peu différent : un truc un peu délirant/fou dans le genre de Fear and loathing in Las Vegas de Gilliam. En fait, pas tellement, mais quand même un peu : un groupe de gars dans leur vingtaine décide de faire un road trip à la recherche d'un cactus aux propriétés hallucinogènes ; lors d'une soirée peu avant le départ, ils rencontrent une jeune femme qui se retrouvera finalement dans ce road trip avec eux - même s'ils l'avaient oublié(e). Le film se recentre ensuite principalement sur deux des personnages, la fille (interprétée par Gaby Hoffmann) et un gars assez immature (interprété par Michael Cera - je crois que la scène qui l'introduit est une scène où il va aux toilettes et où son étron ne veut pas partir...) qui sont assez différents et le film va principalement reposer sur leur influence réciproque l'un sur l'autre. J'aurais aimé que le film nous donne un peu plus que cette évolution de personnages car il y a tout de même plusieurs passages à vide... mais bon, plusieurs séquences m'ont tout de même pas mal fait rire comme celle au début avec le gars qui se la raconte sur Huxley ou alors les séquences un peu new age avec le personnage de Hoffmann et puis les acteurices font ça bien.

Sueurs froides (1958) Alfred Hitchcock

Je voulais faire de la pub pour 2 films, l'un soviétique, l'autre russe.

D'abord, Un accident de chasse, film d'Emil Loteanu, 1978 :




Une adaptation de Tchekhov ... ce qui explique la profondeur du récit ! Cela dit ... il faut un talent fou pour transformer un bon livre profond en film génial. C'est ce que fait Loteanu par sa mise en scène d'une beauté et inventivité formelle saisissante et des acteurs de génie. C'est tout de même complètement hallucinant que ça ne soit pas connu ...


Ensuite, Leto de Kirill Serebrennikov, 2018.




Le rock au début des années 80 en URSS ! Quel sujet improbable  Et pourtant c'est un très bon film. Esthétiquement d'abord, un vrai bonheur. Et puis il arrive à nous plonger dans cette jeunesse éprise de liberté avec un grand intérêt.

Ah mais c'est immense L'accident de chasse (le titre original du film est Ma bête tendre et affectueuse). Qui plus est, il y a dans le casting mon acteur russophone préféré, Oleg Yankovsky. Rien que son regard : il est toujours aussi magnétisant !

Pour les curieux, le film avec les sous-titres en anglais : https://www.youtube.com/watch?v=HVQBlFwvD0o

Harry Potter, un jeune orphelin, est élevé par son oncle et sa tante qui le détestent. Alors qu'il était haut comme trois pommes, ces derniers lui ont raconté que ses parents étaient morts dans un accident de voiture.
Fait toujours plaisir de revoir la série des HP...
Et ce premier film restera une total réussite ...
Vivement la suite !🤩

Anton Bialas : Raie manta        2022

 /   +
J'avais découvert Bialas avec Derrière nos yeux, il y a environ deux ans et demi ; c'était un court-métrage assez mutique d'une trentaine de minutes en trois parties où l'on suivait trois personnages assez différents dans leur quête de sensation. Ici, le format est assez similaire : toujours en trois parties présentées comme assez distinctes avec, malgré tout, un fil conducteur ; on commence avec une jeune femme russophone qui vend ses créations au bord de la Seine et fournit toutes sortes de feux d'artifices et autres petits explosifs, on enchaîne avec un motard épris de vitesse qui se rend à une révolte dans un quartier populaire puis on termine avec un homme s'apprêtant à se rendre à Paris et se faisant contrôler par la police, il y va "pour se jeter d'un pont" - aucune réaction de la police. La différence principale avec Derrière nos yeux est que dans ce court, Bialas met l'accent pas tellement le parallélisme des trajectoires mais plutôt sur leur continuité l'une par rapport à l'autre : sur fond d'autoritarisme, les gens, même isolés, se manifestent, établissent une communauté sensible comme dirait l'autre. La raie manta témoigne de cette continuité revendiquée : l'une des créations de la jeune femme est un dessin de raie manta puis le film se termine sur une gopro immergée dans la scène filmant une raie manta (!) qui s'envole ; je trouve l'utilisation de cet animal assez juste parce qu'il y a cette même duplicité : il semble presque être ailé alors qu'il vit toujours en pleine mer. Je n'ai pas trouvé ce court totalement abouti (le fil de la raie manta aurait plus être davantage développé) mais il y a vraiment un sens de la narration d'ordre cinématographique (cette manière de faire parler les images entre elles presque sans paroles) que l'on trouvait déjà pas mal dans Derrière nos yeux. J'ai lu quelque part que Bialas préparait son premier long-métrage, je suis vraiment curieux à propos du résultat : va-t-il recycler ses courts, abandonner son format tripartite ou peut-être simplement le faire évoluer ?

Mia Hansen-Løve : Un pur esprit        2004


Ce court-métrage de quelques minutes filmé en noir et blanc est la deuxième réalisation de Hansen-Løve qui n'est honnêtement pas extrêmement passionnant : en hiver, une jeune femme marche dans un parc et regarde des garçons jouer au foot ; cette séquence est prise entre des séquences plus méditatives où elle filme plusieurs endroits du parc, comme s'il s'agissait d'en traduire son ressenti par la caméra.

Alice Guy : Falling leaves        1912


Ce film est un court-métrage d'une bonne dizaine de minutes issu de la période américaine d'Alice Guy (donc produit par Solax, les studios (et la maison de production) fondée (entre autres) par Alice Guy et son mari). L'idée est très simple et d'une extrême mignonnerie : une jeune femme est atteinte de tuberculose, le médecin intervient et annonce à la famille que la malade mourra après que les feuilles soient tombées ; le prenant au mot, la petite sœur décide d'accrocher les feuilles aux branches pour les empêcher de tomber. Quelques temps après, un docteur ayant récemment mis au point un remède efficace contre la tuberculose passe dans les environs et interloqué par l'activité de la petite sœur s'arrête et discute avec elle, il administre ensuite à la malade son nouveau sérum et après une ellipse de quelques mois, on voit que ça fonctionne. Un très chouette court-métrage.

Gan Bi : A short story        2022


J'avais découvert Bi Gan (en salle !) avec Un grand voyage vers la nuit qui m'avait vraiment impressionné, j'ai poursuivi (à rebours) avec Kaili blues ; la trajectoire des deux films était celle de la recherche du/d'un souvenir(s) (le scooter de Kaili blues, le train du Grand voyage vers la nuit) ; ici, on retrouve aussi ce point (une chambre qui s'ouvre sur un train dans la séquence centrale. Le film est également un peu plus atypique puisque ce qui lance le film, c'est tout de même un chat noir qui rencontre un épouvantail, ce dernier lui demande de le brûler pour qu'il puisse rejoindre ses amis et lorsque le chat lui demande ce qui est pour lui de plus précieux dans la vie, l'épouvantail le renvoie vers trois personnes ; il prend alors la cape de l'épouvantail et part à la recherche de celles-ci. Visuellement, c'est toujours très léché (j'ai beaucoup aimé les plans de l'introduction et les couleurs de la première partie) et la voix-off est assez belle par moments mais je crois que ça m'a tout de même moins marqué que ses deux longs.

Aki Kaurismäki : Tavern man        2012


Ce film est assez à part dans la filmographie de Kaurismäki : s'il tourne la plupart de ses films en Finlande et qu'il en a tourné quelques-uns en France, il me semble que celui-ci est le seul à être tourné au Portugal. Il est vraiment très simple : on suit la journée du gérant (?) multicasquette d'une petite taverne assez peu fréquentée ; le film n'a quasiment aucun dialogue mais (comme souvent chez le réalisateur) la manière de filmer arrive complètement à faire passer quelque chose des solitudes à l'œuvre dans le film ; je sais pas, il y a quelque chose de très immédiat et à la fois un peu reposant car on a l'impression que le film est lui-même très serein ; bon, après, je sais pas si c'est un court qui va rester longtemps (et vivement) dans ma mémoire mais c'est chouette à regarder - et puis, encore une fois, chouette photographie.

Cet après-midi :

Les Oiseaux (1963) Alfred Hitchcock





Ce soir :

Le Rideau déchiré (1966) Alfred Hitchcock

Justine Triet : Vilaine fille, mauvais garçon        2012


Ce film est la quatrième réalisation de Triet (tous des courts), on est juste avant son premier long (La bataille de Solférino) et si je n'ai pas été trop convaincu par ce dernier, j'ai trouvé ce court d'une trentaine de minutes plus convaincant. Le film débute véritablement lors d'une soirée où se rencontrent un peintre (interprété par Thomas Lévy-Lasne) et une comédienne (interprétée par Laetitia Dosch) ; il y a tellement de choses qui se passent (tour par l'hôpital psychiatrique, détour par la famille, soirée en elle-même puis after ensemble avec petite séquence sur chatroulette (eh oui, 2012)) qui sont juxtaposées les unes aux autres que j'ai trouvé que le film donnait une impression de soirée interminable à laquelle (si l'on dort) on se réveille avec des fonds de verre partout et de la bouffe un peu partout de la veille.

Monia Chokri : Babysitter        2022

 +
J'avais découvert la Monia Chokri réalisatrice par La femme de mon frère (comme beaucoup de monde), il y a un peu plus de quatre ans déjà. À l'époque, je n'avais pas été totalement convaincu par le film : je le trouvais marrant (je me souviens qu'il y avait un sosie de Michel Foucault) mais un peu dolanien (surtout d'un point de vue sonore...), pas hyper passionnant en terme de mise-en-scène et un peu court sur pattes. Ici, c'est tout-à-fait autre chose : on reste dans quelque chose d'assez drôle (et de même véritablement drôle) mais la mise-en-scène est nettement plus maîtrisée (certain(e)s diront peut-être qu'elle est trop démonstrative mais cet aspect démonstratif fonctionne bien). Le film raconte l'histoire d'une blague sexiste faite à une journaliste et captée en direct à la télévision et qui devient par la suite extrêmement populaire ; son auteur est renvoyé de l'entreprise qui l'employait (pas tellement dans le cadre de la lutte contre le sexisme mais simplement parce que ce n'est pas trop bon pour l'image de l'entreprise) et doit suivre un stage de sensibilisation sur ce sujet ; à terme, il décide d'écrire une lettre d'excuse à la journaliste en question qui se transforme finalement en livre qui va encore se transformer en un livre de lettre à toutes les femmes victimes de sexisme ; j'ai trouvé cette évolution (et tout le truc général selon lequel ce sont les hommes qui vont sauver des violences sexistes et sexuelles - ils ne le disent pas délibérément mais c'est ce qui en ressort) assez amusante. Parallèlement, le couple fait appel à une babysitter car la femme est en dépression post-partum ; le personnage de la babysitter est assez amusant (et curieux) tant il sait tout faire et est partout - à la fin, elle finit même avec la mère du nouveau né qui porte une robe tout droit sortie de celle de Seyrig dans Les lèvres rouges de Kümel. Le film ne se prend jamais au sérieux, sur aucun des plans, c'est bordélique mais vraiment divertissant - et réussi.