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| Mahler- 1ère symphonie | |
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Auteur | Message |
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Iskender Mélomane chevronné
Nombre de messages : 2700 Age : 57 Localisation : Bretagne Date d'inscription : 11/08/2009
| Sujet: Re: Mahler- 1ère symphonie Mar 12 Avr 2016 - 19:42 | |
| J'ai écouté cette 1ère par Nezet-Seguin et je me retrouve pas mal dans ce qu'en dit André.
Tout d'abord entre la qualité de cet orchestre et la prise de son, on a un disque de très grande classe. Ce que l'on retient en premier lieu de la direction de Nezet-Seguin est ce côté très soigné : équilibre parfait entre les pupitres de cuivres, notamment cors et trompettes, des alliages de timbres magnifiques dans les bois (et une intonation d'ensemble au cordeau, écoutez les flûtes et les clarinettes !). La prise de son très "au premier plan" met les cordes dans notre salon.
Après le soin ça ne suffit pas : si Nezet-Seguin ne suscite pas l'ennui et ne pêche pas dans le maniérisme - mis à part ce ralenti des violoncelles dans la phrase d''exposition - tout ça manque un peu de souffle. D'autant plus frustrant que comme dit André, quand il lâche les chevaux (fin du 1er mouvement, dernier mouvement) c'est génial.
En fait j'avais eu exactement les mêmes impressions à l'écoute de sa fantastique : beaucoup de classe, un côté travail d'orfèvre, de vrais moments extatiques réussis. C'est déjà beaucoup, mais il manque quelque chose pour susciter l'adhésion totale. Au fil de sa carrière, j'ai beaucoup de sympathie et de respect pour ce chef, mais pas plus et c'est curieux, je le regretterais presque. |
| | | Horatio Mélomane chevronné
Nombre de messages : 4135 Age : 30 Localisation : Très loin de la plage ! Date d'inscription : 04/07/2011
| Sujet: Re: Mahler- 1ère symphonie Mar 12 Avr 2016 - 22:02 | |
| Mon avis en complément de ceux d'André et d'Iskender. Je les rejoins particulièrement à propos de la prise de son, de la précision de l'interprétation et de la beauté sonore de l'orchestre. La discipline et les capacités du BRSO sont fabuleuses.
Il s'agit assurément d'une excellente version. Il faut enjamber un premier mouvement sans relief, dont la plupart des effets tombent à plat. Les musiciens s'ébrouent enfin à sa conclusion, et l'écoute devient intéressante alors que le second mouvement débute ; écoutez comment le chef insuffle du panache à cette terrienne danse paysanne ! La suite est tout aussi heureuse - que de couleurs, de dynamiques, et quelle direction intelligente.
La splendeur sonore semble devenir la norme pour interpréter Mahler - et son écriture théâtrale s'y prête volontiers. Je regrette toutefois que ces lourdes parures en estompent un autre aspect essentiel, à savoir la causticité et les grincements. La Marche funèbre de Nezet-Seguin est parfaitement jouée, mais nulle part ne frotte ni ne grimace. Ailleurs, les bois déroulent avec facilité déconcertante leurs arabesques sur le tapis de dentelle tissé par les cordes, c'est magnifique - mais bien luxueux pour des Naturlaut. J'apprécie cette vision flamboyante de la Titan, mais elle n'épuise pas l'alternative interprétative ; je reste attaché aux contributions de Kegel (Dresde) et d'Ancerl (CPO) à une symphonie qui, au milieu des salons viennois, se souvient encore des campagnes de Bohême. |
| | | A Mélomane chevronné
Nombre de messages : 5473 Date d'inscription : 04/02/2013
| Sujet: Re: Mahler- 1ère symphonie Mer 13 Avr 2016 - 22:09 | |
| Deuxième écoute. J'ai apprivoisé le monde sonore qui m'avait tant impressionné à la première écoute (prise de son fabuleuse de profondeur et de transparence, exécution follement virtuose, mais d'une virtuosité "du terroir"). J'ai apprivoisé aussi la vision très jeune du chef et de son orchestre. Incroyable comme ils le suivent pas à pas, sans la moindre hésitation, comme si cette oeuvre leur appartenait et qu'ils étaient tout fiers de faire étalage de leurs qualités d'exécution. YNS tient l'équilibre entre le côté 'vieux sage' qui lui fait aborder le I comme un éveil ensommeillé et attendri de la nature en été, et le côté 'chien fou' qui se régale des bacchanales mahlériennes du IV. Le finale est formidable. L'accord de la fin n'a jamais été aussi bien 'proportionné'. Sans la lourdeur de Bernstein à Amsterdam (où il double la timbale par la grosse caisse), ni la légèreté un peu guindée de ceux qui suivent la partition à la lettre. Avec NZ c'est la conclusion triomphante d'une coda torrentielle. Certainement une de mes versions préférées d'une symphonie problématique. Davis, également avec le BRSO est une autre version unique de fraîcheur mais aussi de virilité assumée (donc non démonstrative), très bien enregistrée. Label Novalis. Je vais réécouter ça, car crois que ce filon munichois est particulièrement bien pourvu. L'ancienne version de Kubelik est également de haute qualité, mais il faut dire ce qui est: les ingénieurs de la DGG n'ont jamais su exploiter la résonance et les graves de cette salle. Tout est clair et intelligible, mais aussi grêle et sans réelle profondeur (bidimensionnel). |
| | | georges2 Mélomane averti
Nombre de messages : 195 Date d'inscription : 17/07/2016
| Sujet: Re: Mahler- 1ère symphonie Mer 20 Juil 2016 - 12:23 | |
| Chef d'œuvre et très enregistrée, cette partition ne compte que peu de réussite . Je n'écoute pratiquement que 3 conceptions: Haitink Berlin & Amsterdam 72 une poésie claire et envoûtante, Giulini Chicago , l'inspiration dans un langage vrai et Tennsted Londres au rubato généreux. La version Giulini est préférable en 33 t .
Georges |
| | | Horatio Mélomane chevronné
Nombre de messages : 4135 Age : 30 Localisation : Très loin de la plage ! Date d'inscription : 04/07/2011
| Sujet: Re: Mahler- 1ère symphonie Mer 20 Juil 2016 - 14:27 | |
| Chef-d'œuvre, certes, peu de réussites, c'est à nuancer. Cette première symphonie se prête aussi bien que les suivantes, à des conceptions diverses. Elle est (aussi) romantique, débarrassée du luxe sonore et des prétentions pompeuses à l'universalisme, qui surgissent dans la Résurrection et irriguent toutes les symphonies suivantes. Cet aspect ne peut s'exprimer dans les versions bourgeoises que tu cites (et qui ont d'autres qualités : orchestres superlatifs, qualité de la direction - encore qu'Haitink m'inspire généralement un ennui poli). Giulini, Haitink et Tennstedt nous promènent à travers les grandes salles de concert, mais n'épuisent en aucun cas cette symphonie.
Dernière édition par Horatio le Mer 20 Juil 2016 - 21:40, édité 1 fois |
| | | Mélomaniac Mélomane chevronné
Nombre de messages : 28855 Date d'inscription : 21/09/2012
| Sujet: Re: Mahler- 1ère symphonie Mer 20 Juil 2016 - 16:16 | |
| - Horatio a écrit:
Giulini [...] nous promènent à travers les grandes salles de concert
Je manque de neutralité puisque cet enregistrement fut celui qui me fit découvrir l'oeuvre, néanmoins, mon opinion n'a jamais changé à la réécoute critique : je trouve la version de Giulini pas si mondaine que ça, au contraire. Bien sûr l'interprétation atteste d'une élégance, d'un maintien, d'une hauteur de vues qui tendent à classiciser l'oeuvre. Mais les clarinettes du I sont de celles qui me font le mieux sentir les fleurs de champs d'une promenade dans les alpages. Partout ailleurs la justesse de vues, la sincérité des sentiments ennoblissent la mécanique chromée de cet orchestre à grosse cylindrée. Et on échappe à la boursouflure d'autres témoignages que grava le maestro italien avec cette luxueuse phalange (Schubert, Bruckner, Stravinsky), et que je n'ai jamais vraiment appréciés. |
| | | DavidLeMarrec Mélomane inépuisable
Nombre de messages : 97923 Localisation : tête de chiot Date d'inscription : 30/12/2005
| Sujet: Re: Mahler- 1ère symphonie Mer 20 Juil 2016 - 16:59 | |
| - georges2 a écrit:
- Chef d'œuvre et très enregistrée, cette partition ne compte que peu de réussite .
Je ne vois pas pourquoi… Je ne crois pas en avoir entendu une mauvaise, même si certaines m'ont convaincu et d'autres plus poliment ennuyé (à commencer par celles, hors Tennstedt, mais plutôt sur le vif, que tu cites ). Vu ce que contient la discographie de chefs et orchestres émérites, il serait difficile de cumuler les mauvaises expériences, non ? [Sinon, si l'on parle de goûts personnels, mon tropisme est à peu près à l'opposé du tien : Ančerl-Philharmonie Tchèque, Kondrachine-Radio Moscou, Neuhold-Karlsruhe. Là-dedans, du grain un peu champêtre, de l'acidité, ça me convient bien mieux que de grandes machines brucknériennes – mais j'aurais tort d'en faire une vérité générale, puisque même dans Bruckner… Et, certes, d'autres lectures plus rondes comme Tennstedt-LPO sur le vif, Ozawa-Boston ou Stuitner-Dresde.] |
| | | georges2 Mélomane averti
Nombre de messages : 195 Date d'inscription : 17/07/2016
| Sujet: Re: Mahler- 1ère symphonie Dim 24 Juil 2016 - 9:43 | |
| J'ai beaucoup écouté Abbado/Chicago, surtout pour le premier mvt , théâtral mais superbe! Un disque de démonstration nécessitant une hifi de haut niveau. |
| | | Diablotin Mélomaniaque
Nombre de messages : 1153 Age : 58 Localisation : Strasbourg Date d'inscription : 25/03/2010
| Sujet: Re: Mahler- 1ère symphonie Jeu 29 Déc 2016 - 11:23 | |
| Très belle version, très narrative et enjouée : J'ai beaucoup apprécié -peut-être la plus belle introduction que j'ai pu entendre-, malgré une prise de son ancienne et un orchestre un peu vert, mais qui "fonctionne" malgré tout très agréablement. Anna Mahler -la fille du compositeur- considérait d'ailleurs Steinberg comme un chef admirable dans l'interprétation des oeuvres de son père à cette époque, et le préférait par exemple à Bruno Walter. |
| | | Mélomaniac Mélomane chevronné
Nombre de messages : 28855 Date d'inscription : 21/09/2012
| Sujet: Re: Mahler- 1ère symphonie Lun 26 Fév 2018 - 23:08 | |
| Dans sa mouture initiale, telle qu'elle fut présentée à Budapest le 20 novembre 1889, cette Symphonie se structurait comme un poème en cinq tableaux, incluant un bref Andante intitulé « Blumine », que Mahler retrancha après 1894, et qui de ce fait s'entend rarement joué, au concert comme au studio. Quelques chefs l'enregistrèrent néanmoins, dont Seiji Ozawa. Notons que ce mouvement ne figurait pas sur le microsillon DG 2530 993 gravé en octobre 1977, mais apparut postérieurement pour compléter le disque 410 845-1 publié en 1984. Dans son remake pour Philips en octobre 1987, Ozawa s'est limité aux quatre mouvements définitifs, sans ce Blumine. Cette interprétation brille par sa lucidité, sa poigne et son enthousiasme volontariste, même si l'on peut regretter un certain manque de spontanéité, de libre respiration : on gagne en clarté d'architecture ce qu'on perd en mystère et en sensibilité. - Mélomaniac, in playlist, a écrit:
Gustav Mahler (1860-1911) :
Symphonie n°1 en ré majeur
= Seiji Ozawa, Orchestre symphonique de Boston
(DG, octobre 1977)
Version en cinq mouvements, avec interpolation du Blumine dont les préciosités amènent un répit timoré avant les rustiques danseries du scherzo qu'on a l'habitude d'entendre en seconde partie. Interprétation encore meilleure que dans mon souvenir, et une anthologique prise de son : a-t-on jamais mieux capté l'acoustique du Boston Symphony Hall ? Quelle ampleur, quelle densité des timbres !
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| | | kevrad Mélomane du dimanche
Nombre de messages : 54 Age : 41 Localisation : Paris Date d'inscription : 13/10/2017
| Sujet: Re: Mahler- 1ère symphonie Mer 21 Mar 2018 - 11:24 | |
| salut à tous Lors des différents concerts dans lesquels j'ai écouté cette magnifique symphonie, j'ai remarqué que certains cuivres se lèvent lors du final. Parfois les trompettes, parfois les cors. quelqu'un en sait il plus? choix du compositeur ou du chef d'orchestre? je me souviens par exemple qu'avec le Philhar il y a 2 ans à Paris, c'est Mikko Franck lui même qui s'est levé et non pas les musiciens... merci d'avance Kevrad |
| | | Bruno Luong Mélomaniaque
Nombre de messages : 1750 Date d'inscription : 07/08/2012
| Sujet: Re: Mahler- 1ère symphonie Mer 21 Mar 2018 - 12:14 | |
| - kevrad a écrit:
- salut à tous
Lors des différents concerts dans lesquels j'ai écouté cette magnifique symphonie, j'ai remarqué que certains cuivres se lèvent lors du final. Parfois les trompettes, parfois les cors. quelqu'un en sait il plus? choix du compositeur ou du chef d'orchestre? je me souviens par exemple qu'avec le Philhar il y a 2 ans à Paris, c'est Mikko Franck lui même qui s'est levé et non pas les musiciens... merci d'avance Kevrad Compositeur. Certains chefs ignorent l'indication. Autre que cela, parfoirs Mahler indiqua même que les bois devraient pointer leurs instruments ! Barbirolli une fois est critiqué par un critique de faire du spectable gratuit en faisant lever les musiciens, il a répondu en envoyant une copie de la partition. |
| | | kevrad Mélomane du dimanche
Nombre de messages : 54 Age : 41 Localisation : Paris Date d'inscription : 13/10/2017
| Sujet: Re: Mahler- 1ère symphonie Mer 21 Mar 2018 - 15:35 | |
| ok merci j'attends toujours ce moment avec impatience... |
| | | kevrad Mélomane du dimanche
Nombre de messages : 54 Age : 41 Localisation : Paris Date d'inscription : 13/10/2017
| Sujet: Re: Mahler- 1ère symphonie Ven 23 Nov 2018 - 17:16 | |
| Nouvelle occasion d'entendre la Premiere jeudi à la Philharmonie avec Daniel Harding et l'ODP. Quelqu'un saurait il me dire quel pupitre va se lever lors du 4eme mouvement? Harding reproduit il generalement la même chose? |
| | | Bruno Luong Mélomaniaque
Nombre de messages : 1750 Date d'inscription : 07/08/2012
| Sujet: Re: Mahler- 1ère symphonie Ven 23 Nov 2018 - 17:21 | |
| La section des cors, lorsque le choral revient. |
| | | Bruno Luong Mélomaniaque
Nombre de messages : 1750 Date d'inscription : 07/08/2012
| Sujet: Re: Mahler- 1ère symphonie Dim 31 Mar 2019 - 12:30 | |
| Après une série de concert en 2018, voici le disque de FX Roth Les Siècles de la version Hambourg/Weimar 1893-1894 "Titan" (on ne peut qu'utilise ce titre qu'avec cette version). Sortie en Mai. |
| | | Benedictus Mélomane chevronné
Nombre de messages : 15565 Age : 49 Date d'inscription : 02/03/2014
| Sujet: Re: Mahler- 1ère symphonie Dim 31 Mar 2019 - 12:40 | |
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| | | Ravélavélo Mélomane chevronné
Nombre de messages : 9130 Localisation : Pays des Bleuets Date d'inscription : 28/09/2015
| Sujet: Re: Mahler- 1ère symphonie Dim 31 Mar 2019 - 15:54 | |
| J'ai cette version par Lorin Maazel avec l'Orchestre National de France, l'une de mes symphonies préférées de Mahler, surtout pour le thème de "Frère Jacques' qu'on retrouve dans le troisième mouvement. |
| | | Benedictus Mélomane chevronné
Nombre de messages : 15565 Age : 49 Date d'inscription : 02/03/2014
| Sujet: Re: Mahler- 1ère symphonie Dim 31 Mar 2019 - 23:01 | |
| À la suite de l’annonce alléchante de Bruno et de la contribution de Ravelavélo, j’ai réécouté ceci: • Rafael Kubelik / Symphonie-Orchester des Bayerischen RundfunksMunich, X.1967 DGÇa a été ma version de découverte, quand j’étais ado (j’ai dû l’écouter des dizaines, et peut-être même des centaines de fois.) Eh bien, je dois dire que, contre toute attente, ça reste peut-être ma version préférée - beaucoup moins «gentille» que le souvenir que j’en avais gardé, c’est d’abord surtout une lecture passionnante par ses contrastes. Beaucoup de contrastes d’abord dans le grain instrumental: si les couleurs ne sont pas les plus séduisantes du monde (elles ont même parfois un côté cru et un peu acide qui n’est pas pour me déplaire), elles n’en ont pas moins une saveur «de terroir» que j’aime beaucoup, et surtout les textures sont vraiment très typées. Les attaques très droites des cordes graves, les différences de timbres entre les instruments à anches de la petite harmonie et entre les différentes percussions, le jeu sur les sourdines et l’émission ouverte pour les cuivres... tout cela possède un relief remarquable (en particulier dans les réponses des vents dans le I ou dans les attaques des cordes divisées du II.) La prise de son y contribue d’ailleurs: très détaillée, avec un spectre aéré qui permet d’entendre avec une netteté inaccoutumée les contrechants, les arrière-plans et de beaux effets de résonance et d’échos - c’en est même très surprenant pour un enregistrement du SOBR par DG de ces années-là (c’est d’ailleurs nettement moins sensible dans les autres symphonies de cette intégrale, il me semble.) Le seul défaut de cet enregistrement en est peut-être d’ailleurs le corolaire: un certain manque d’ampleur dans les dynamiques élevées des grands climaxes (où, curieusement, Kubelik semble anticiper les lectures très dégraissées de ces dernières décennies, comme celles de Roth ou Iván Fischer.) Beaucoup de contrastes aussi dans le tempo et les phrasés. Dans les passages les plus grandiloquents, on retrouve certes la propension de Kubelik a privilégier un élan très direct, avec des tempi très vifs et des phrasés un peu droits - si ce n’est une certaine brutalité (ce que j’apprécie d’ailleurs ici - comme dans ses 7ᵉ de Mahler live, ses Hartmann ou ses Janáček.) Mais par ailleurs, Kubelik sait oser un rubato et des accentuations très prononcés qui fonctionnent remarquablement bien et creusent les potentialités expressives de la partition: ici, c’est le ralentissement de certains passages contemplatifs qui les parent d’un climat de suspension envoûtant (dans les deux mouvements extrêmes); là, c’est le soulignement des rythmes et des appuis par un rubato très prononcé qui donne à l’allure une sorte de déhanché irrésistible (le Trio du III, ici absolument génial); et puis, plus généralement, ces nuances d’agogique très marquées qui intensifient sans cesse la relance du discours, ce qui est vraiment le signe d’une compréhension profonde de la musique de Mahler. Donc, au total, vraiment une très, très grande version qui creuse comme peu d’autres les potentialités expressives et sonores de cette symphonie. |
| | | Mélomaniac Mélomane chevronné
Nombre de messages : 28855 Date d'inscription : 21/09/2012
| Sujet: Re: Mahler- 1ère symphonie Lun 1 Avr 2019 - 0:42 | |
| Très pertinente analyse, j'y souscris complètement. J'avais découvert cette Titan dans la version autrement lyrique de Giulini (à Chicago, Emi) et peu après celle de Kubelik, plus axée terroir danubien. Effectivement, les élans, les aspérités, le style bourru échappent à la grandiloquence sans trahir la partition mais en la servant avec un zèle décapant et non moins profond dans sa compréhension du langage du jeune Mahler. |
| | | Benedictus Mélomane chevronné
Nombre de messages : 15565 Age : 49 Date d'inscription : 02/03/2014
| | | | Bruno Luong Mélomaniaque
Nombre de messages : 1750 Date d'inscription : 07/08/2012
| Sujet: Re: Mahler- 1ère symphonie Ven 10 Mai 2019 - 14:37 | |
| La partition de la version Hambourg (poème symphonique Titan donc) vient d'être publiée par l'édition Universal https://www.universaledition.com/sheet-music-shop/titan-for-large-orchestra-mahler-gustav-ue33911 |
| | | Adalbéron Mélomaniaque
Nombre de messages : 1224 Age : 1005 Localisation : Rue de la Grande Truanderie Date d'inscription : 21/08/2015
| Sujet: Re: Mahler- 1ère symphonie Ven 10 Mai 2019 - 16:23 | |
| Le même jour que la parution de cet enregistrement, donc : - Bruno Luong a écrit:
Après une série de concert en 2018, voici le disque de FX Roth Les Siècles de la version Hambourg/Weimar 1893-1894 "Titan" (on ne peut qu'utilise ce titre qu'avec cette version). Sortie en Mai. |
| | | Benedictus Mélomane chevronné
Nombre de messages : 15565 Age : 49 Date d'inscription : 02/03/2014
| Sujet: Re: Mahler- 1ère symphonie Lun 15 Juil 2019 - 18:03 | |
| - Xavier a écrit:
- Mahler: Symphonie n°1/Roth
- Benedictus a écrit:
- C'est vraiment la Symphonie nº1 ou bien Titan, Eine Tondichtung in Symphonieform dans l'enregistrement avec Les Siècles?
- Xavier a écrit:
- Oui oui, bon, c'est presque pareil.
- Benedictus a écrit:
- Je dirais: oui et non. C'est un peu comme certaines symphonies de Bruckner, entre les versions originales et les versions révisées: ce n'est bien sûr pas radicalement différent, mais c'est quand même sensiblement différent - à la fois structurellement (l'insertion de Blumine modifie quelque peu la perspective d'ensemble) mais aussi dans le détail des équilibres instrumentaux, des textures, dans les contrastes de rythme et de phrasés.
Ça m'avait paru aller encore plus loin dans ce sens que ce que proposait Kocsis avec le Philharmonique National de Hongrie (qui avait gardé le titre «Symphonie nº1»); mais je ne serais bien incapable de dire ce qui, là-dedans, relève effectivement de la partition proprement dite (Roth suit l'édition critique de Kubik et Hefling, qui n'existait pas quand Kocsis avait enregistré) et ce qui relève de l'interprétation de Roth (dans la conduite rythmique et les appuis, ses versions de la 5 et de la 3 présentent des idiosyncrasies qui ressortent assez nettement) ou des timbres spécifiques des Siècles.
C'est pour ça en fait, que je te posais la question: ça m'intéresserait d'avoir une interprétation de la partition courante de la 1ᵉ par Roth pour savoir ce qu'il en est (il l'a d'ailleurs sûrement déjà jouée avec la SWR ou le Gürzenich.) - DavidLeMarrec a écrit:
- Il y a des changements d'instrumentation discrets (honnêtement j'ai rien repéré dans mes diverses écoutes de versions originales ou semi-originales de la 1), ce n'est pas au degré de Bruckner où la structure même des mouvements peut être altérée (pour ne rien dire de ceux carrément récrits).
Je crois que la spécificité tient vraiment à l'orchestre et aux choix de Roth avec celui-ci (il ne fait pas du tout le même type de Mahler plus dans la saillance que dans la structure avec les orchestres tradis, où il livre au contraire des lectures très progressives et équilibrées). - Bruno Luong a écrit:
- Kocsis n'insert que le Blumine en 2e mouvement sur la version finale de la 1ere symphonie. Il y a pleins de chefs qui fonts ca avant lui (Ozawa ou Rattle - si on reprogramme le CD - pour ne citer que les chefs très populaires).
Donc dire que Kocsis va plus loin que Roth est un mirage, ce dernier utilise en plus des vents de l’époque de Mahler, pas Kocsis.
Ce n'est pas parce que Kubik ait publié en 2018 la partition d’Universal qu'elle n'était pas accessible auparavant. Wyn Morris a commencé à diriger le Titan version pré Hambourg/Weimar (1893-1894) dès 1970, suivi par Wakasugi (1989), Ruud (1997), Hamar (2004) de Vriend (2009), Hengelbrock (2014).
Quelques détails de la différence dans l'orchestration entre la version Hambrourg/Wiemar :
- l'ouverture il y a le basson à la place de la clarinette, puis les cors en unisson à la place des clarinettes
- Mahler il y a ses timbales à l'ouverture du Scherzo.
- Le frère jacques débute avec timbale, basse et violoncelle en section. La version finale on a timbale et solo-basse.
Mais cette version Hambourg-Weimar reste finalement relative proche à la version finale.
Par contre la toute 1ere version Budapest (1889) est très confidentielle. Pendant longtemps on croyait que la partition a disparue, jusqu'à la découverte des 3 mouvements récemment dans la collection Mahler-Rosé. Il existe un document sonore joué par un orchestre amateur New England Conservatory, dirigé par Hugh Wolff en 2011 sur youtube de cette version (le même chef s'encharge du concours Elisabeth cette année). C'est fascinant parce que qu'il y a beaucoup plus de connexion entre le Blumine et le Finale, que je trouve très différent de la symphonie #1.
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| | | Horatio Mélomane chevronné
Nombre de messages : 4135 Age : 30 Localisation : Très loin de la plage ! Date d'inscription : 04/07/2011
| Sujet: Re: Mahler- 1ère symphonie Lun 4 Nov 2019 - 0:13 | |
| J'aime revenir à la 1e symphonie -- dont certaines beautés, surtout dans celles des mouvements impairs, se livrent au fur et à mesure des réécoutes. (Par contraste, je trouve difficile de revenir pour la Résurrection). Ai récemment découvert la version de Kondrashin avec le NDR Sinfonieorchester. Dernier concert du chef russe, qui meurt quelques heures après. Dans l'ensemble, une interprétation typique de Kondrashin : une lecture tendue, attentive, privilégiant les inflexions aux effets. Le premier propose des moments magnifiquement suspendus, dans une expectative qui se résout avec naturel, tandis que le caractère populaire et dansant du second mouvement est bien assumé. Puis commence le troisième mouvement, qui est ici une sorte de miracle. Le propos se resserre le long d'une ligne claire, et l'essence musicale de ce mouvement devient absolument évidente. Peu à peu, toute sensation de pesanteur disparaît, cède à une espèce de rayonnement intérieur.
Dans sa version studio avec le Philharmonique de Moscou, Kondrashin avait pris les mêmes options pour ce troisième mouvement ; elle est également très belle, mais légèrement moins tendue. Ancerl, avec le Philharmonique Tchèque, a une optique similaire, mais des tempos légèrement plus différenciés, et accentue davantage des éléments caustiques. |
| | | DavidLeMarrec Mélomane inépuisable
Nombre de messages : 97923 Localisation : tête de chiot Date d'inscription : 30/12/2005
| Sujet: Re: Mahler- 1ère symphonie Mar 5 Nov 2019 - 14:14 | |
| Ah oui, Kondrachine dans Mahler, et en particulier ici, quel naturel, quel élan ! |
| | | Mélomaniac Mélomane chevronné
Nombre de messages : 28855 Date d'inscription : 21/09/2012
| Sujet: Re: Mahler- 1ère symphonie Ven 24 Jan 2020 - 23:58 | |
| - Ravélavélo, in playlist, a écrit:
- Benedictus a écrit:
- Ravélavélo a écrit:
Gustav Mahler * Symphonie no. 1 Orchestre Symphonique de la Radio Bavaroise Rafael Kubelik 1 cd DG, 1968
Ma version tradi préférée! (J'en avais parlé ici.)
Oui, une version qui reste tout à fait recommandable et cette symphonie est selon moi la plus facile d'écoute. Heureux qu'elle te plaise et que nos goûts se rejoignent... Mélomaniac suggère la version Giulini / Chicago (EMI), la version suggérée par Bruno Luong avec Les Siècles pique aussi ma curiosité. Je surveille les bonnes affaires pour rajouter ces doublons.
C'est la version qui m'a fait découvrir cette symphonie, je l'aime toujours beaucoup (son tact, son classicisme, et aussi sa fraicheur très alpine dans le Naturlaut, même si nous somme dans l'Illinois). Toutefois je ne me souviens pas avoir écrit que ce serait ma version préférée, car il y en a quelques unes que je place au premier rang ex aequo, dans des styles variés. Je les récapitulerai pour le Mélomaniac d'or afférent. Je ne suis pas sûr que Kubelik/DG entre dans cette catégorie. Un peu trop sec à mon goût. Je préfère le chef tchèque dans d'autres (la 2°, la 5°, la 8°) et pour la Titan je privilégie son enregistrement à Vienne pour Decca. |
| | | Ravélavélo Mélomane chevronné
Nombre de messages : 9130 Localisation : Pays des Bleuets Date d'inscription : 28/09/2015
| Sujet: Re: Mahler- 1ère symphonie Sam 25 Jan 2020 - 4:06 | |
| - Mélomaniac a écrit:
- Ravélavélo, in playlist, a écrit:
- Benedictus a écrit:
- Ravélavélo a écrit:
Gustav Mahler * Symphonie no. 1 Orchestre Symphonique de la Radio Bavaroise Rafael Kubelik 1 cd DG, 1968
Ma version tradi préférée! (J'en avais parlé ici.)
Oui, une version qui reste tout à fait recommandable et cette symphonie est selon moi la plus facile d'écoute. Heureux qu'elle te plaise et que nos goûts se rejoignent... Mélomaniac suggère la version Giulini / Chicago (EMI), la version suggérée par Bruno Luong avec Les Siècles pique aussi ma curiosité. Je surveille les bonnes affaires pour rajouter ces doublons.
C'est la version qui m'a fait découvrir cette symphonie, je l'aime toujours beaucoup (son tact, son classicisme, et aussi sa fraicheur très alpine dans le Naturlaut, même si nous somme dans l'Illinois). Toutefois je ne me souviens pas avoir écrit que ce serait ma version préférée, car il y en a quelques unes que je place au premier rang ex aequo, dans des styles variés. Je les récapitulerai pour le Mélomaniac d'or afférent. Je ne suis pas sûr que Kubelik/DG entre dans cette catégorie. Un peu trop sec à mon goût. Je préfère le chef tchèque dans d'autres (la 2°, la 5°, la 8°) et pour la Titan je privilégie son enregistrement à Vienne pour Decca.
Je copie ton message en réponse à Benedictus: - Mélomaniac a écrit:
- Très pertinente analyse, j'y souscris complètement.
J'avais découvert cette Titan dans la version autrement lyrique de Giulini (à Chicago, Emi) et peu après celle de Kubelik, plus axée terroir danubien. Effectivement, les élans, les aspérités, le style bourru échappent à la grandiloquence sans trahir la partition mais en la servant avec un zèle décapant et non moins profond dans sa compréhension du langage du jeune Mahler. La version Kubelik/Vienne (London) semble disponible en version mono et aussi en stéréo (1969). |
| | | Bruno Luong Mélomaniaque
Nombre de messages : 1750 Date d'inscription : 07/08/2012
| Sujet: Re: Mahler- 1ère symphonie Sam 25 Jan 2020 - 9:36 | |
| - Ravélavélo a écrit:
La version Kubelik/Vienne (London) semble disponible en version mono et aussi en stéréo (1969).
Il doit avoir une erreur il n'y a pas de version stéréo, uniquement mono de 1954. |
| | | Ravélavélo Mélomane chevronné
Nombre de messages : 9130 Localisation : Pays des Bleuets Date d'inscription : 28/09/2015
| Sujet: Re: Mahler- 1ère symphonie Sam 25 Jan 2020 - 14:51 | |
| - Bruno Luong a écrit:
- Ravélavélo a écrit:
La version Kubelik/Vienne (London) semble disponible en version mono et aussi en stéréo (1969).
Il doit avoir une erreur il n'y a pas de version stéréo, uniquement mono de 1954. Merci pour cette précision importante, ça répond à ma question. C'est selon ce que j'ai vu à l'en-dos de la pochette, l'image est pas terrible mais en haut à droite on voit MONO: Et puis l'image de la pochette est d'un style assez ancien: Par contre, sur cette image l'enregistrement est marqué 'Stéréo'. Je te remercie infiniment pour tes commentaires à propos de la nouvelle partition et l'enregistrement de la 'Titan' par l'ensemble Les Siècles !
Dernière édition par Ravélavélo le Sam 25 Jan 2020 - 15:48, édité 1 fois |
| | | Bruno Luong Mélomaniaque
Nombre de messages : 1750 Date d'inscription : 07/08/2012
| Sujet: Re: Mahler- 1ère symphonie Sam 25 Jan 2020 - 15:04 | |
| La réponse est est là il s'agit de la "stéréo" trafiquée. |
| | | Ravélavélo Mélomane chevronné
Nombre de messages : 9130 Localisation : Pays des Bleuets Date d'inscription : 28/09/2015
| Sujet: Re: Mahler- 1ère symphonie Sam 25 Jan 2020 - 15:13 | |
| - Bruno Luong a écrit:
- La réponse est est là il s'agit de la "stéréo" trafiquée.
Comment peut-on trafiquer ainsi une version mono pour en faire une version stéréo. C'est pour ça que je me demandais: ils l'ont refait ? |
| | | Bruno Luong Mélomaniaque
Nombre de messages : 1750 Date d'inscription : 07/08/2012
| Sujet: Re: Mahler- 1ère symphonie Sam 25 Jan 2020 - 15:17 | |
| - Ravélavélo a écrit:
- Bruno Luong a écrit:
- La réponse est est là il s'agit de la "stéréo" trafiquée.
Comment peut-on trafiquer ainsi une version mono pour en faire une version stéréo. C'est pour ça que je me demandais: ils l'ont refait ? Ils décalent la phase (mono) pour créer les canaux gauche et droite, procédure complètement artificielle et ca n'apporte rien sur la localisation des instruments. |
| | | Ravélavélo Mélomane chevronné
Nombre de messages : 9130 Localisation : Pays des Bleuets Date d'inscription : 28/09/2015
| Sujet: Re: Mahler- 1ère symphonie Sam 25 Jan 2020 - 15:23 | |
| - Bruno Luong a écrit:
- Ravélavélo a écrit:
- Bruno Luong a écrit:
- La réponse est est là il s'agit de la "stéréo" trafiquée.
Comment peut-on trafiquer ainsi une version mono pour en faire une version stéréo. C'est pour ça que je me demandais: ils l'ont refait ? Ils décalent la phase (mono) pour créer les canaux gauche et droite, procédure complètement artificielle et ca n'apporte rien sur la localisation des instruments. Oui, c'est indiqué sur l'image, si j'avais lu plus attentivement, j'aurais compris: 'Mono recordings electronically reprocessed to give stereo effect on stereo equipment'. Merci encore pour avoir si bien éclairé ma lanterne. |
| | | Benedictus Mélomane chevronné
Nombre de messages : 15565 Age : 49 Date d'inscription : 02/03/2014
| Sujet: Re: Mahler- 1ère symphonie Ven 1 Jan 2021 - 2:35 | |
| • Daniel Harding / Berliner PhilharmonikerEn public, Berlin, XII.2018 Berliner Philharmoniker RecordingsMagnifique lecture, où la conjonction du son berlinois au terme de l’ère Rattle et de la manière de Harding dans Mahler me semble particulièrement heureuse. Le son de Berlin façonné par Rattle, c’est donc cet orchestre aux timbres fabuleusement transparents: des couleurs remarquablement fines et nuancées, des instruments qui se distinguent par leurs textures aux grains très différenciées, très focalisées aussi, qui ne noient ni ne saturent jamais le spectre (le plus spectaculaire, de ce point de vue, étant peut-être les cordes graves: dès qu’elles entrent en jeu, on sent une sorte de grande frappe vibrée, ample mais nette, qui ouvre spectaculairement l’espace sans couvrir les autres pupitres.) Jusqu’à présent, j’ai toujours trouvé que ces caractéristiques orchestrales-là accentuaient ce qui me déplaît dans le Mahler de Rattle (je n’ai pas encore écouté ses 6-7-8 avec Berlin, mais je garde un mauvais souvenir de sa 2ᵉ et de sa 9ᵉ); en revanche, ça fonctionne formidablement bien avec la manière de Harding. C’est que le Mahler de Harding se distingue par deux données essentielles. D’une part, c’est un Mahler tout en élan et en tension continue: Harding se refuse les épanchements du rubato (la battue, les phrasés y sont assez droits, ce qui donne un II particulièrement élancé, continument relancé, et d’une fermeté altière - mais on pourrait attendre plus de déhanchement dans le III) comme le «gros son» expansif (c’est très sensible dans les grands tutti du IV, qui sont cravachés dans une sorte de verticalité qui «claque» méchamment, pas du tout dans le genre «grondements telluriques.») Et pour cela, la sonorité de Berlin, avec son espèce de galbe tranchant, mais aussi son impressionnante discipline d’ensemble répondent avec une formidable efficacité à ce type de lecture urgente et très «directionnelle» (à l’opposé des approches «séquentielles» de l’œuvre) et l’effet produit est tout à fait électrisant. D’autre part, c’est un Mahler essentiellement polyphonique, dont la modernité s’inscrit toute entière dans l’hétérogénéité de son tissu orchestral: par son travail de mise en place, ce que Harding construit ici, c’est une sorte de contrepoint-patchwork quasi ivesien. Ainsi, le I donne vraiment à entendre des matériaux sonores disparates qui s’agrègent progressivement en strates dont les alliages vont se reconfigurer sans cesse en fonction de la conduite «cinétique» du discours. Mais cette logique possède son corollaire inverse: c’est-à-dire que Harding fait aussi ressortir la façon dont les contrechants, les traits solistes, les effets de spatialisation… viennent desceller et disjoindre le langage symphonique traditionnel. Et il faut reconnaître que la matière sonore transparente aux textures différenciées de Berlin paraît l’instrument idéal pour un tel travail polyphonique. Grande interprétation, donc, qui rejoint certaines lectures «modernistes» des pionniers (ça m’a beaucoup fait penser à Rosbaud - à la fois pour la conduite très directionnelle et le spectre disjoint), mais avec une qualité de réalisation sonore superlative (en plus de la sonorité de l’orchestre, il faut dire un mot de la captation: finement détaillée, bien aérée mais ample et profonde - et surtout très naturelle, sans zooms et autres fastidieux bidouillages à la mode.) |
| | | sergio Mélomane averti
Nombre de messages : 338 Date d'inscription : 19/07/2010
| Sujet: Re: Mahler- 1ère symphonie Jeu 28 Jan 2021 - 17:58 | |
| - A a écrit:
Deuxième écoute. J'ai apprivoisé le monde sonore qui m'avait tant impressionné à la première écoute (prise de son fabuleuse de profondeur et de transparence, exécution follement virtuose, mais d'une virtuosité "du terroir").
J'ai apprivoisé aussi la vision très jeune du chef et de son orchestre. Incroyable comme ils le suivent pas à pas, sans la moindre hésitation, comme si cette oeuvre leur appartenait et qu'ils étaient tout fiers de faire étalage de leurs qualités d'exécution. YNS tient l'équilibre entre le côté 'vieux sage' qui lui fait aborder le I comme un éveil ensommeillé et attendri de la nature en été, et le côté 'chien fou' qui se régale des bacchanales mahlériennes du IV.
Le finale est formidable. L'accord de la fin n'a jamais été aussi bien 'proportionné'. Sans la lourdeur de Bernstein à Amsterdam (où il double la timbale par la grosse caisse), ni la légèreté un peu guindée de ceux qui suivent la partition à la lettre. Avec NZ c'est la conclusion triomphante d'une coda torrentielle.
Certainement une de mes versions préférées d'une symphonie problématique. Davis, également avec le BRSO est une autre version unique de fraîcheur mais aussi de virilité assumée (donc non démonstrative), très bien enregistrée. Label Novalis. Je vais réécouter ça, car crois que ce filon munichois est particulièrement bien pourvu. L'ancienne version de Kubelik est également de haute qualité, mais il faut dire ce qui est: les ingénieurs de la DGG n'ont jamais su exploiter la résonance et les graves de cette salle. Tout est clair et intelligible, mais aussi grêle et sans réelle profondeur (bidimensionnel). Un grand souvenir également de cet orchestre dans la même oeuvre au TCE il y a plusieurs années dirigés par Maris Jansons |
| | | Iskender Mélomane chevronné
Nombre de messages : 2700 Age : 57 Localisation : Bretagne Date d'inscription : 11/08/2009
| Sujet: Re: Mahler- 1ère symphonie Dim 19 Nov 2023 - 17:25 | |
| - En Playlist, arnaud bellemontagne a écrit:
- Iskender a écrit:
- Mahler : Symphonie n°1 - London SO, Solti [Decca 1964, remastered]
avec partition.
Cet enregistrement colle des frissons en sens physique du terme du début à la fin. C'est un truc de dingue. Après ça, on n'écoute rien. Je dois être le seul à préférer son remake avec Chicago. Je sais, je suis bizarre. Peut-être une petite préférence pour Londres mais je mets la version Chicago quasiment au même niveau. Ça se tient à des détails. Je me passerais d'ailleurs bien du hautbois solo de Londres à l'époque. En revanche Barry Tuckwell au cor ça n'a pas de prix, et le Laendler est incroyable dans la version Londres. Je n'ai que très rarement Solti comme premier choix en général, car le spectaculaire ne fait pas tout en musique, mais ici ce sont les versions que je préfère. On a besoin de ce côté tellurique (début du IV), que je ne retrouve pas autant ailleurs, hormis peut-être Boulez-Chicago. J'aime aussi beaucoup Kubelik, récemment évoqué sur ces pages.
Dernière édition par Iskender le Mar 21 Nov 2023 - 10:52, édité 1 fois |
| | | vinteix Mélomane averti
Nombre de messages : 393 Age : 55 Localisation : Japon Date d'inscription : 27/10/2006
| Sujet: Re: Mahler- 1ère symphonie Mar 21 Nov 2023 - 4:48 | |
| - Benedictus a écrit:
- À la suite de l’annonce alléchante de Bruno et de la contribution de Ravelavélo, j’ai réécouté ceci:
• Rafael Kubelik / Symphonie-Orchester des Bayerischen Rundfunks Munich, X.1967 DG
Ça a été ma version de découverte, quand j’étais ado (j’ai dû l’écouter des dizaines, et peut-être même des centaines de fois.) Eh bien, je dois dire que, contre toute attente, ça reste peut-être ma version préférée - beaucoup moins «gentille» que le souvenir que j’en avais gardé, c’est d’abord surtout une lecture passionnante par ses contrastes.
Beaucoup de contrastes d’abord dans le grain instrumental: si les couleurs ne sont pas les plus séduisantes du monde (elles ont même parfois un côté cru et un peu acide qui n’est pas pour me déplaire), elles n’en ont pas moins une saveur «de terroir» que j’aime beaucoup, et surtout les textures sont vraiment très typées. Les attaques très droites des cordes graves, les différences de timbres entre les instruments à anches de la petite harmonie et entre les différentes percussions, le jeu sur les sourdines et l’émission ouverte pour les cuivres... tout cela possède un relief remarquable (en particulier dans les réponses des vents dans le I ou dans les attaques des cordes divisées du II.) La prise de son y contribue d’ailleurs: très détaillée, avec un spectre aéré qui permet d’entendre avec une netteté inaccoutumée les contrechants, les arrière-plans et de beaux effets de résonance et d’échos - c’en est même très surprenant pour un enregistrement du SOBR par DG de ces années-là (c’est d’ailleurs nettement moins sensible dans les autres symphonies de cette intégrale, il me semble.) Le seul défaut de cet enregistrement en est peut-être d’ailleurs le corolaire: un certain manque d’ampleur dans les dynamiques élevées des grands climaxes (où, curieusement, Kubelik semble anticiper les lectures très dégraissées de ces dernières décennies, comme celles de Roth ou Iván Fischer.)
Beaucoup de contrastes aussi dans le tempo et les phrasés. Dans les passages les plus grandiloquents, on retrouve certes la propension de Kubelik a privilégier un élan très direct, avec des tempi très vifs et des phrasés un peu droits - si ce n’est une certaine brutalité (ce que j’apprécie d’ailleurs ici - comme dans ses 7ᵉ de Mahler live, ses Hartmann ou ses Janáček.) Mais par ailleurs, Kubelik sait oser un rubato et des accentuations très prononcés qui fonctionnent remarquablement bien et creusent les potentialités expressives de la partition: ici, c’est le ralentissement de certains passages contemplatifs qui les parent d’un climat de suspension envoûtant (dans les deux mouvements extrêmes); là, c’est le soulignement des rythmes et des appuis par un rubato très prononcé qui donne à l’allure une sorte de déhanché irrésistible (le Trio du III, ici absolument génial); et puis, plus généralement, ces nuances d’agogique très marquées qui intensifient sans cesse la relance du discours, ce qui est vraiment le signe d’une compréhension profonde de la musique de Mahler.
Donc, au total, vraiment une très, très grande version qui creuse comme peu d’autres les potentialités expressives et sonores de cette symphonie.
Très belle analyse à laquelle je souscris entièrement. Sans doute pas la version la plus titanesque, mais la plus lyrique que je connaisse, évitant toute lourdeur. On est saisi par le rayonnement de cette interprétation, remarquable par sa transparence (Boulez-Chicago étant au sommet sur le plan de la clarté), la souplesse des inflexions, le phrasé, faisant ressortir le côté très rhapsodique de l'oeuvre. Le tout servi par une exceptionnelle prise de son, en effet. Même si j'aime beaucoup aussi Ancerl, Ozawa-Boston, Sinopoli, Boulez et Abbado-Chicago (pour d'autres raisons), c'est finalement vers cette version que je reviens le plus volontiers (même si ce n'est pas la symphonie de Mahler que j'écoute le plus souvent)... sans oublier Solti-LSO ! pour l'éclat (le finale !) et la tension, avec un ciselé unique, maintenue du début à la fin. |
| | | Prestissimo Mélomaniaque
Nombre de messages : 685 Date d'inscription : 21/01/2024
| Sujet: Re: Mahler- 1ère symphonie Jeu 25 Jan 2024 - 21:40 | |
| Ecoute ce soir de la version Mitropoulos de... 1941. Le son stéréo ne passe bien sûr que sur un seul canal, parce que la stéréo ça s'appelait mono en ce temps-là.
Mais l'interprétation est toute dynamique, avec ce "groove" caractéristique de tout ce que j'ai entendu chez Mitropoulos, des rondeurs dans les cuivres et les vents qui contaminent jusqu'au jeu des violons. Grand coup de cœur pour le second mouvement très énergique et encore plus dansant qu'ailleurs. La prise de son est formidable pour l'époque, même si des ajustements ont été faits - par exemple, j'imagine que le coup de cymbale qui démarre le quatrième mouvement est atténué pour ne pas démolir le micro, c'était pas du matos costaud à l'époque (Captain Beefheart arrivait encore à en fracasser rien qu'avec son râle dans les années 60). Ce quatrième mouvement arrive encore à emporter par sa force malgré toutes les limitations techniques qui viennent contenir les envolées des violons dans la toute-fin. Les tempos sont toujours vifs, plus rapides que ce que j'ai pu entendre ailleurs (Kubelik, Solti, Bernstein, Zinman...). Une version excitante. |
| | | nakatomi Mélomane du dimanche
Nombre de messages : 78 Age : 63 Localisation : Paris Date d'inscription : 14/02/2013
| Sujet: Re: Mahler- 1ère symphonie Ven 9 Fév 2024 - 0:37 | |
| - Iskender a écrit:
- En Playlist, arnaud bellemontagne a écrit:
- Iskender a écrit:
- Mahler : Symphonie n°1 - London SO, Solti [Decca 1964, remastered]
avec partition.
Cet enregistrement colle des frissons en sens physique du terme du début à la fin. C'est un truc de dingue. Après ça, on n'écoute rien. Je dois être le seul à préférer son remake avec Chicago. Je sais, je suis bizarre. Peut-être une petite préférence pour Londres mais je mets la version Chicago quasiment au même niveau. Ça se tient à des détails. Je me passerais d'ailleurs bien du hautbois solo de Londres à l'époque. En revanche Barry Tuckwell au cor ça n'a pas de prix, et le Laendler est incroyable dans la version Londres. Je n'ai que très rarement Solti comme premier choix en général, car le spectaculaire ne fait pas tout en musique, mais ici ce sont les versions que je préfère. On a besoin de ce côté tellurique (début du IV), que je ne retrouve pas autant ailleurs, hormis peut-être Boulez-Chicago. J'aime aussi beaucoup Kubelik, récemment évoqué sur ces pages. Je suis en train d’écouter la version Londres de Solti, entièrement d’accord… Le hautbois est juste insupportable …. J’ai relu pas mal de posts sur le sujet de la première symphonie : j’avoue que j’en étais resté à Inbal que j’apprécie dans sa globalité. Je me suis plutôt amusé, en lisant les avis opposés sur la version Ancerl et il faut bien que je me range du côté des détracteurs ! Toute la petite harmonie a un son d’une telle horreur qu’il faut vraiment avoir les oreilles en fibrociment pour ne pas en convenir. J’avoue qu’en entendant la clarinette je me suis posé des questions… Les Cors jouent archi clair et vibré à la Thevenet de la grande époque. Il y a certainement un grand engagement de la part des musiciens, mais là vraiment je n’adhère pas ; non seulement le son ne me plaît pas, mais les choix artistiques d’Ancerl me déconcertent. Je pourrais détailler tout ça, mais franchement je n’en ai pas le courage ! Beaucoup d’autres versions valent le détour, pas de temps à perdre. En revanche, je veux bien entendre Kodaly avec cet orchestre. J’ai aussi écouté le 1er mvt Zinman & Tonhalle des dynamiques intéressantes et un très bel orchestre. ( très chouette ce qu’il fait avec les petites fanfares ) |
| | | Bruno Luong Mélomaniaque
Nombre de messages : 1750 Date d'inscription : 07/08/2012
| Sujet: Re: Mahler- 1ère symphonie Ven 9 Fév 2024 - 9:41 | |
| A part Kubelik (DG + Audite), Ozawa (DG), Le live de Haitink à Berlin (DVD), Boulez, Gielen, Kocsis, j'ai une tendresse pour ce concert de Kondrashin dirigé lo'orchestre NDR à Concertgebouw en 1981, remplacé en urgence Tennstedt. Le chef a seulement une heure de répétition avec l'orchestre. Est-ce-qu'il a rejoué cet symphonie depuis son exile ? En tout cas quel concert ! Pas de reprise de l'exposition mais on s'en fout. Kondrashin sera mort quelques heures après le concert. Le disque est difficile trouvé. On peut l'écouter sous youtube. |
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