Repris du fil général...
- Benedictus a écrit:
- Mais tu as exploré le reste du catalogue chambriste et pianistique? Payasages et marines, L'Album de Lilian, le Septuor à vent, L'Ancienne Maison de campagne, les Sonatines... À mon avis, tu devrais trouver des trucs pour toi, là-dedans. (Voire de quoi te risquer sur le bizarre avec Vers le soleil pour ondes Martenot, la Stèle funéraire pour trois flûtes successives ou les Chants de Nectaire.)
Voici donc deux jours que j'ai mon programme personnel en pause pour explorer de façon systématique le Koechlin chambriste, avec priorité aux œuvres suggérées ci-dessus.
Je me suis repassé les sonates pour violon (féerique) et alto (sombre et dramatique, avec ces incroyables mouvements centraux, et la plainte du I !!!), deux immenses, immenses chef d'œuvres de la littérature pour ces instruments. Celle pour violoncelle me fait toujours l'effet d'un peu de sucre dilué dans de l'eau, je pense que l'esthétique m'est complètement étrangère.
J'ai aussi été écouté toutes les autres sonates, et elles recèlent des merveilles ! Ma première surprise tient à leur durée. Autant celles pour cordes sont substantielles, autant celles pour vents dépassent rarement la dizaine de minutes. Nous avons donc celle pour flûte et piano, celle pour deux flûtes, celle pour basson et piano, celles pour clarinette et piano. La No. 2 pour clarinette m'est particulièrement sympathique, elle sonne vraiment différente, atmosphère douce-amère voire plutôt riante, là ou la No. 1 évoque des choses plus sinueuses entendues dans la musique pour piano seul (comprendre : si on a déjà entendu du Koechlin, l'impression de redite est
très forte). Le reste est hautement recommandable.
Je ne reviens pas sur le célèbre quintette avec piano Op. 80, c'est un sommet de la musique de chambre pour cette formation.
Pour les compositions à plus grand effectif, j'ai réécouté avec délice le disque Timpani des
Ensembles Initium et
Contraste. Le
Septuor est charmant (les effets d'écho de l'
Intermezzo, et la
Fugue sur un air populaire !), mais c'est vraiment
Paysages et marine et surtout la
Sonate à Sept qui m'enchantent. Les alliages de timbre, la variété des climats qui inervent les deux sont un régal ininterrompu. Le
Paysage d'octobre donne froid, là où les
Pommiers en fleurs étaient gorgés de soleil. Et les chansons de marins !
Chant des pêcheurs et
Ceux qui s'en vont pêcher, tellement entraînantes ! Et la sonate est juste belle à tomber, 3 mouvements sur 4 sont des Andante, or pas un instant on ne perçoit la moindre redite ou l'enfermement dans une humeur d'un genre particulier comme c'est souvent le cas à l'orchestre. N'oublions pas les deux sonatines pour hautbois d'amour du même disque, très touchantes, d'une beauté un peu surannée, évoquant les suites de danses qui fleurissaient dans le premier XX
e. Le mystérieux
Presque adagio de la No. 2 a particulièrement retenu mon attention. Toutefois, mon (mauvais) goût étant ce qu'il est, j'avoue pencher vers les pastiches de
Hahn, plus évocateurs, colorés et moins déprimés.
Le Bal de Béatrice d'Este, par le même Ensemble Initium, c'est quelque chose ! Et à vrai dire, toute la discographie de ces gens est éminemment écoutable.
J'ai bien entendu donné leur chance aux bizarreries.
Stèle funéraire est trop étale de la façon qui peut m'ennuyer à l'orchestre.
Vers le soleil, pour ondes Martenot, m'a bien plu ! On est assez loin des hululements de
Planète Interdite attendus avec l'instrument. Cela sonne étonnament comme la B.O. de
Fez ou
Hyper Light Drifter (pour le lecteur candide : rétro-gaming, jeux vidéo à l'esthétique 8 ou 16 bits).
Les Chants de Nectaire (le livre I seulement) par
Artaud ne m'ont — surprise ! — pas déplu ! Grande, grande variété des pièces, et le registre possiblement fatigant de l'instrument n'est pas surexploité comme j'ai trop souvent entendu chez d'autres compositeurs, j'ai envie d'explorer le cycle dans son entièreté.
Pour des choses plus traditionnelles...
Les Chansons bretonnes pour violoncelle et piano sont de belles pièces, sans être nécessairement saillantes ou électrisantes. Même avis pour le généralement nostalgique
Portrait de Daisy Hamilton, dont certains épisodes ont un pouvoir d'attraction certain (
Le Chant de la Mer et
Berceuse nocturne pour moi).
L'
Épitaphe de Jean Harlow est très courte mais d'une grande séduction. Quant au trio à vents et au
Repos de Tityre, ils se laissent tout à fait goûter, mais ne provoquent pas l'envie d'y revenir.
Piano seul, j'ai retenté
L'Ancienne Maison de campagne, et c'est en quelque sorte la version miniature et simplifiée des
Heures persanes, où des choses plus directes ou vivantes, comme
Jeux, et les clichés rétro des
Fiancés de 1830 et de
La Leçon de piano côtoient le monde nocturne et évanescent — et plus attendu — des
Reliques de deuil, ou de
La Vieille Fontaine. Évidemment, j'ai adoré.
Les
Sonatines sont assez rapidement oubliables, et j'ai trouvé les
Paysages et marine peu palpitants dans cette version en noir et blanc.
Relatives déceptions à l'écoute ou à la réécoute : le quintette Op. 223, vraiment très beau et assez superficiel, même si le dernier mouvement est délicieux, on attend presque
La Marche nuptiale ! Le
Primavera sonne comme un autre compositeur, optimiste, souriant et bondissant, sans les effets d'irisation que l'on trouve ailleurs. Mignon mais qui délivre un plaisir auditif éphémère, en fait.
Les quatuors, charmants mais pas de grandes œuvres. Le No. 1 en pastorale avec finale en danse populaire pourrait trouver son public. Le No. 2 est plus sombre, tourmenté, mais tellement plus long, bien trop eu égard à la matière et à l'originalité du matériau (ou plutôt, son manque). Il n'y a guère que le final bretonnisant (dansant et animé !) du II qui ait retenu mon attention. Le No. 3 possède la même grâce que les sonates pour vents : sa brièveté. Il s'agit autrement d'un petit quelque chose globalement souriant et pas follement personnel, si ce n'est la seconde moitié du II (on attendrait dans d'autres compositions des ondes ou une flûte pour cette note tenue).
Les
Albums de Lilian me sont restés lettre close. C'est certes différent en tant que concept, mais je n'y ai rien trouvé de nouveau ou d'extraordinaire. Un cycle de piano avec des guests sur certains mouvements, original pour l'époque, mais résultat sans surprise. Du coup,
Joie de plein air, pour piano seul, ressemble même à une exacte citation d'
À travers la rue des
Heures persanes.
- DavidLeMarrec a écrit:
À ce qu'a dit Benedictus, j'ajoute les Chansons de Gladys, tout ça devrait te ravir. (Car dans le petit effectif, je tiens Koechlin pour l'un des plus grands…)
Essayé dans la foulée, c'est fort recommandable, mais beaucoup moins éblouissant que les meilleures pièces... J'ai pensé à
Dubois en plus instable, plus par association d'idée à cause du nom rare, je devine (Marjolie) ?
Du coup, je crains de ne pas être très original, mais pour récapituler ce que je considère comme absolument prioritaire :
Chambre :
- Quintette Op. 80
- Sonate pour violon
- Sonate pour alto
- Sonate à sept
Piano :
- Les Heures persanes
- L'Ancienne Maison de campagne
À tenter :
- Les Chants de Nectaire
- Sonatines, Op.194
- Paysages et marine, Op. 63b
- Sonate pour clarinette No. 2
Et la confirmation que Koechlin à l'orchestre (œuvres originales), sans moi, alors que Koechlin chambriste et pianiste : un compositeur absolument extraordinaire.